Bilan stratégique du rapport annuel de performances |
Philippe ERRERA |
Directeur général des affaires politiques et de sécurité |
Responsable du programme n° 105 : Action de la France en Europe et dans le monde |
En 2019, guidée par la défense de ses intérêts et par celle des valeurs de droits de l’Homme, de démocratie et de justice internationale, la France s’est à nouveau engagée dans i) le règlement des crises internationales, ii) la mise en place d’une Europe qui protège et iii) la réforme du système de gouvernance internationale.
1) Dans un contexte qui continue d’être marqué par la persistance de la menace que le terrorisme fait peser sur notre sécurité et nos intérêts, la lutte contre le terrorisme a constitué la priorité de notre action. Outre son engagement au Sahel avec l’opération Barkhane, la France a continué de contribuer activement aux efforts de la Coalition internationale contre Daech. Elle a également veillé à ce que la question de la lutte contre le terrorisme soit traitée dans le cadre d’une approche globale, en investissant les champs de la lutte contre l’utilisation d’internet à des fins terroristes (lancement le 15 mai 2019 à Paris par le Président de la République et la Première ministre néo-zélandaise de l’ « Appel de Christchurch pour supprimer les contenus terroristes et extrémistes violents en ligne »), de la lutte contre le financement du terrorisme (adoption à notre initiative, le 28 mars 2019, de la résolution 2462 du Conseil de Sécurité des Nations unies qui souligne aussi la nécessité que ces actions soient conformes au droit international humanitaire, participation en novembre 2019 à la deuxième édition de la Conférence ministérielle sur la lutte contre le financement d’Al Qaeda et de Daech « No Money for Terror » en Australie, qui a notamment permis de suivre la mise en œuvre des mesures de l’« Agenda de Paris » adopté lors de la première conférence organisée en avril 2018 à Paris, de l’action humanitaire et de la stabilisation, de la coopération sur les questions de la prévention et de la lutte contre la radicalisation et de la lutte contre les déplacements internationaux de combattants terroristes. La France a, dans ce contexte, mobilisé l’ensemble des enceintes multilatérales concernées : UE, Nations Unies et G7 en particulier. La lutte contre le terrorisme a d’ailleurs constitué une des priorités de la présidence française du G7 en 2019.
La France a activement œuvré à la recherche de solutions politiques, en particulier au Moyen-Orient et en Afrique.
En Syrie, la France a continué à appuyer les efforts des Nations Unies, au Conseil de sécurité et en lien avec tous les acteurs concernés et notamment la Russie, en vue de la mise en place d’une transition politique crédible, conforme au communiqué de Genève et à la résolution 2254 du Conseil de sécurité des Nations Unies, seule voie pour lutter durablement contre Daech, mettre fin à la guerre civile et permettre le retour volontaire des personnes réfugiées et déplacées. La France s’est pleinement mobilisée sur le plan humanitaire, en Syrie et auprès des pays du voisinage affectés par la crise des réfugiés, tout en restant attachée à la ligne européenne qui conditionne le financement de la reconstruction au lancement d’une transition politique inclusive et crédible.
En Irak, la France a poursuivi ses efforts pour accompagner ce pays dans les défis auxquels il fait face en matière de sécurité, de réconciliation nationale, de reconstruction et de mise en œuvre d’une gouvernance inclusive.
En Libye, elle a continué à appuyer les efforts des Nations Unies pour mettre fin au conflit en cours et parvenir à une solution politique, indispensable pour stabiliser le pays et lutter durablement contre le terrorisme et les trafics de migrants. Elle a œuvré à la mise en place d’une trêve à l’occasion de l’Aid Al-Adha. La France a également activement participé au succès du processus de Berlin en initiant une réunion ministérielle co-présidée avec l’Italie, en marge de l’Assemblée générale des Nations Unies.
S’agissant du conflit israélo-palestinien, et dans un contexte particulièrement difficile de fragilisation de la solution des deux États, notre action en faveur du processus de paix en 2019 s’est concentrée sur la réaffirmation des paramètres internationaux, y compris au plus haut niveau, et un soutien sur le terrain à la solution des deux États (maintien de notre contribution de 20M€ et signature d’un projet à hauteur de 21MEUR au profit de l’UNRWA, engagement de plus de 40M€ de l’AFD au profit de la Palestine dans la continuité du séminaire intergouvernemental franco-palestinien du 7 décembre 2018).
La prévention du développement d’un programme nucléaire militaire par l’Iran et, à cette fin, la préservation de l’accord sur le nucléaire iranien (JCPOA) a été un axe prioritaire de notre action, notamment à la suite du retrait des États-Unis de l’accord et de la réimposition des sanctions secondaires américaines en 2018 et 2019. La France a maintenu ses efforts en vue de la préservation pour l’Iran des bénéfices économiques liés à l’accord de Vienne. A ce titre, en coopération avec le Royaume-Uni et l’Allemagne, la France a créé en 2019 le mécanisme INSTEX visant à permettre la poursuite des flux commerciaux entre l’UE et l’Iran, et contribuer au maintien de l’Iran dans l’accord nucléaire. En 2019, en lien avec ses partenaires allemands et britanniques, la France a également poursuivi ses efforts en vue d’une désescalade des tensions dans la région à la suite de plusieurs actions déstabilisatrices par l’Iran dans la région. La France, en lien avec ses partenaires E3, a ainsi identifié les paramètres d’un accord potentiel entre les États-Unis et l’Iran et a cherché à rapprocher les vues de ces deux États. La France a enfin lancé avec plusieurs partenaires européens une initiative dans le domaine de la sécurité maritime dans le Golfe arabo-persique dans ses dimensions diplomatique et opérationnelle.
En Afrique, la France a poursuivi ses efforts de lutte contre le terrorisme au Sahel. Outre les opérations réussies de l’armée française, en partenariat avec ses partenaires de la région, la France a continué à soutenir la montée en puissance de la Force conjointe du G5 Sahel et, avec l’Allemagne, lancé le Partenariat pour la sécurité et la stabilité au Sahel à l’occasion du Sommet du G7 à Biarritz (août). La France a poursuivi son action en matière de développement dans la région via l’Alliance Sahel. En tant que partenaire du Mali et membre permanent du Conseil de sécurité, elle contribue à promouvoir la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation. Au plan politique, la France a renoué son partenariat avec la RDC et soutenu la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation en RCA (signé en février 2019). Face à la dégradation de la situation sécuritaire et politique au Cameroun, la France a poursuivi une diplomatie discrète auprès des autorités camerounaises et marqué sa disposition à accompagner la mise en œuvre des conclusions du Grand dialogue national (octobre). La France s’est également positionnée en partenaire privilégié des transitions en Éthiopie et au Soudan. Enfin, la France a poursuivi la mise en œuvre des engagements pris par le Président de la République à Ouagadougou, notamment sur l’économie (lancement de l'initiative ChooseAfrica de soutien à l'entrepreneuriat africain), les biens culturels ou la diaspora (réunion de Bordeaux organisé par le Président de la République, en juillet, dans la perspective du sommet Afrique-France de 2020).
En tant que membre permanent du Conseil de Sécurité et État doté de l’arme nucléaire, la France a un rôle important à jouer sur le dossier nord-coréen. Elle est ainsi restée pleinement engagée dans la phase actuelle de pression accrue sur le régime nord-coréen, en déployant des moyens militaires visant à surveiller et lutter contre les transbordements illicites de pétrole menés en Mer de Chine par la Corée du Nord, en menant des démarches auprès de la communauté internationale pour l’application effective des résolutions du Conseil de sécurité, et en plaidant en faveur d’une position de fermeté de l’Union européenne, notamment au moyen de sanctions autonomes. Nous avons également encouragé les efforts diplomatiques entamés par la République de Corée et les États-Unis pour parvenir à la dénucléarisation de la Corée du Nord.
S’agissant du conflit à l’Est de l’Ukraine, la France est restée pleinement mobilisée pour aboutir à une solution qui permette la stabilisation de l’Ukraine dans le respect de sa souveraineté et de son intégrité territoriale. Elle a ainsi poursuivi ses efforts dans le cadre du format Normandie (France, Allemagne, Ukraine, Russie) : les nombreuses réunions au niveau des conseillers diplomatiques et des directeurs politiques ont permis d’aboutir à la tenue d’un sommet des chefs d’État et de gouvernement du format Normandie le 9 décembre 2019 à Paris. Ce sommet a permis de rappeler la finalité des accords de Minsk, c’est-à-dire le rétablissement plein et entier de la souveraineté ukrainienne sur le Donbass et adopté des mesures immédiates pour stabiliser la situation en zone de conflit, dont la mise en œuvre sur le terrain a commencé à la fin de l’année 2019.
Pour chacune de ces crises, la défense des droits de l’Homme et du droit international humanitaire a été au cœur de notre action diplomatique en 2019. La France est restée pleinement mobilisée pour lutter contre l’impunité des crimes, notamment en Syrie, et pour protéger les défenseurs des droits. Elle a également déployé une aide humanitaire pour alléger les souffrances des populations civiles, directement ou à travers l’Union européenne ou les Nations Unies. Elle a été à l’initiative, dans le cadre de l’Alliance pour le multilatéralisme, de l’Appel à l’action sur le renforcement de la mise en œuvre du droit international humanitaire et du respect des principes humanitaires, endossé par 43 pays. Elle a également veillé à préserver la possibilité pour les citoyens d’accéder à une information libre, plurielle et fiable, en lançant, également dans le cadre de l’Alliance pour le multilatéralisme, le Partenariat pour l’information et la démocratie. Elle s’est mobilisée pour les droits des femmes, y compris les droits et la santé sexuels et reproductifs, y compris en vue du Forum Génération Égalité qu’elle accueillera en juillet 2020.
L’année 2019 a été marquée par l’amorce d’un réengagement stratégique vis-à-vis de la Russie. Le Président de la République a accueilli son homologue russe au Fort de Brégançon en août 2019 et a souhaité que la reprise du Conseil de coopération sur les questions de sécurité (CCQS) entre les ministres français et russe des Affaires étrangères et des Armées, en septembre 2019, soit l’occasion de proposer à la Russie de travailler à un agenda de confiance et de sécurité, au service de la sécurité du continent européen.
En 2019 s’est également tenu un Sommet de l’OTAN (3-4 décembre 2019, Londres). Intervenant dans un contexte de profonde crise interne de l’organisation, cette réunion des chefs d’État ou de gouvernement a permis d’initier, sur proposition française, une discussion stratégique sur les objectifs et les missions de l’OTAN et a conduit au lancement d’un processus de réflexion sur l’avenir de l’Alliance devant aboutir d’ici la prochaine rencontre des chefs d’État et de gouvernement en 2021.
2) La mise en place d’une Europe qui protège a été au cœur de nos priorités. La France a ainsi poursuivi son soutien aux initiatives en matière de défense européenne, pour permettre des progrès dans les domaines institutionnels, financiers et capacitaires : opérationnalisation des initiatives de l’UE dans le domaine de la défense, à travers le lancement de nombreux projets dans le cadre de la Coopération structurée permanente et du programme pilote du Fonds européen de défense ; négociations en vue du lancement de la facilité européenne de paix ; création de la nouvelle DG Industrie de défense et espace au sein de la Commission ; renforcement des missions de l’UE au Sahel et en RCA ; poursuite de l’Initiative européenne d’intervention regroupant aujourd’hui treize partenaires européens les plus capables et désireux de s’engager en opération ; consolidation de nos coopérations bilatérales de défense, en particulier avec l’Allemagne (Sommet de Toulouse, le 16 octobre 2019). Par ailleurs, la France s’est fortement impliquée en vue d’une sortie ordonnée du Royaume-Uni de l’Union européenne, tout comme dans le renouvellement des principales institutions européennes en 2019 ; les grandes priorités de l’UE (Conseil européen comme présidence de la Commission) pour la période 2019-2024 sont en cohérence avec les nôtres.
3) Enfin, en 2019, la France a continué à plaider en faveur d’une réforme ambitieuse de la gouvernance mondiale, notamment aux Nations Unies où elle appuie les réformes lancées par le Secrétaire Général des Nations Unies. De manière générale, dans le cadre de la révision de l’architecture et de la gouvernance du système des Nations Unies et des organisations internationales, la France a continué d’œuvrer pour promouvoir de nouveaux modes et normes de gestion plus soutenables, responsables et efficaces (plafonnement des dépenses de personnel et des effectifs, recentrage sur le cœur des mandats et coordination des activités entre organismes, transparence, promotion d’une culture fondée sur les résultats, renforcement des mécanismes de contrôles internes et externes).
Récapitulation des objectifs et des indicateurs de performance |
Objectif 1 | Renforcer la sécurité internationale et la sécurité des Français |
Indicateur 1.1 | Accroître la sécurité de la France au travers de celle de nos partenaires |
Indicateur 1.2 | Veiller à la sécurité des Français à l'étranger |
Objectif 2 | Promouvoir le multilatéralisme et construire l'Europe |
Indicateur 2.1 | Optimiser l'effort français en faveur du maintien de la paix |
Objectif 3 | Assurer un service diplomatique efficient et de qualité |
Indicateur 3.1 | Part des bénéficiaires de l'obligation d'emploi prévue par la loi n° 87-517 du 10 juillet 1987 |
Indicateur 3.2 | Efficience de la fonction support |
Indicateur 3.3 | Efficience de la gestion immobilière |
Indicateur 3.4 | Respect des coûts et délais des grands projets d'investissement |
Indicateur 3.5 | Efficience de la fonction achat |