Présentation stratégique du projet annuel de performances |
Virginie LASSERRE |
Directrice générale de la cohésion sociale |
Responsable du programme n° 177 : Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables |
La politique d’hébergement et d’accès au logement des personnes sans abri ou mal logées portée par le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » doit permettre l’accès au logement autonome et répondre aux situations d’urgence alors que la demande de mise à l’abri ne cesse de croître.
Dans ce contexte, le Gouvernement souhaite sortir d’une gestion quantitative marquée par l’urgence. Il s’agit de favoriser un accès plus direct à un logement autonome et durable à travers des dispositifs d’accompagnement des personnes sans abri ou mal logées. Cette stratégie dite du « logement d’abord » – présentée par le Président de la République à Toulouse le 11 septembre 2017 – est conduite par les ministres chargés de la cohésion des territoires autour des objectifs suivants :
Un changement de culture dans l’orientation des personnes : l’accès direct au logement sera préféré à l’hébergement. Pour cela, la transparence et la fluidité des attributions de logements sociaux devront progresser ;
Le développement du logement adapté : le Président de la République a fixé en ce sens des objectifs ambitieux de création de places d’intermédiation locative (+40 000 places) et en pensions de famille (+10 000 places) ;
Un recentrage de l’hébergement d’urgence sur sa fonction de réponse immédiate et inconditionnelle aux situations de détresse ;
Le développement de l’accompagnement des personnes en difficulté, de l'hébergement d'urgence à l'insertion par l'activité économique jusqu'àl'emploi en s’appuyant sur la création du service public de l'insertion. Le renforcement du lien entre l’insertion par l’emploi avec le logement fait partie de la stratégie « Logement d’abord » ;
La contractualisation pluriannuelle d’objectifs et de moyens (CPOM) avec les opérateurs de l’hébergement dans un objectif de restructuration de l’offre d’hébergement et d’accompagnement des projets d’établissements orientés vers le logement d’abord ;
Le développement, la professionnalisation et une meilleure coordination des maraudes auprès des personnes sans abri pour offrir des prises en charge adaptées et augmenter la connaissance et l’accompagnement des publics sans hébergement. ;
La mobilisation de l’ensemble des acteurs et territoires pour la mise en œuvre de cette stratégie, notamment en accompagnant le changement de culture par des moyens d’ingénierie. 23 territoires ont été sélectionnés en 2018 pour mettre en œuvre de façon accélérée des mesures du « logement d’abord » en proposant des solutions opérationnelles adaptées aux besoins au niveau local ;
L’optimisation des moyens dédiés à l’accompagnement des publics vers et dans le logement avec une refonte des modalités de gestion du fonds national d’accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL), qui est dissocié du programme 177 mais complémentaire, et une montée en puissance des 23 territoires en charge de la mise en œuvre accélérée des mesures du « logement d’abord » sur cet aspect ;
La prévention des ruptures, en particulier la prévention des expulsions et des « sorties sèches » d’institution (aide sociale à l’enfance, prisons…) est un élément incontournable de la stratégie globale du plan ;
La lutte contre l’habitat insalubre, notamment dans les territoires spécifiques comme à Marseille ou en outre-mer, la résorption des bidonvilles et la gestion humanitaire des évacuations de campements de rue en proposant une solution aux publics concernés ;
Le renforcement des modalités de pilotage de la politique du logement d’abord et de l’hébergement ainsi que la connaissance des publics concernés avec le développement d’outils dédiés (livraison en avril 2020 d’une version améliorée du SI des services intégrés d’accueil et d’orientation, qui sera alors déployé à l’échelle nationale et refondu au niveau informatique, mise en œuvre d’un plan de développement de l’intermédiation locative et des pensions de famille, mise en place de méthodes d’observation sociale capitalisant sur les nuits de la solidarité et les autres outils statistiques, etc.) ;
La mise en place du plan « logement d’abord » nécessite préalablement des investissements avec la montée en charge progressive du logement et du logement adapté (logement social et très social, intermédiation locative, pensions de famille…) et le maintien d’un parc de places d’hébergement de qualité. Le principal objectif est de faciliter l’accès au logement et d’améliorer la fluidité du passage des dispositifs d’hébergement au logement, en apportant l’accompagnement nécessaire aux personnes aux faibles ressources en vue de leur maintien pérenne dans le logement.
Les moyens déployés au bénéfice de cette politique sur le programme 177 en 2020 se traduisent par une hausse des crédits alloués au logement adapté (pensions de famille, intermédiation locative). Cet effort s’inscrit dans la continuité des moyens engagés en 2019 et visent à poursuivre la dynamique qualitative du logement d’abord.
La stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté est également mobilisée autour de ces objectifs avec l’ambition de soutenir les publics les plus fragiles. Ce soutien se concrétise comme en 2019 à travers l’adaptation des centres d’hébergement pour les familles, notamment monoparentales, les sortants d’institution, les femmes victimes de violence et les sortants de prison. La stratégie nationale intervient également pour expérimenter « le chez soi d’abord pour les jeunes » (Projet « Housing First for youth »), des projets innovants comme Emile, qui vise à proposer à des personnes en difficulté d’insertion professionnelle et mal-logées en Île-de-France de débuter un nouveau projet de vie dans un territoire d’accueil ayant des besoins de main d’œuvre et du logement disponible.
Les renforts hivernaux sont aussi mieux intégrés à la budgétisation au titre de l’hébergement d’urgence afin d’anticiper les besoins des associations gestionnaires.
L’accueil et l’hébergement des personnes migrantes dans les centres financés par le programme 177 est dépendant de l’identification rapide de leur volonté ou possibilité d’accéder au statut de demandeur d’asile et des capacités des structures ad hoc. Il en résulte un effet de déport sur le programme 177 qui fonctionne sur le principe d’inconditionnalité de l’accueil.
Afin d’optimiser la répartition des publics, une instruction interministérielle du 4 juillet 2019 précise les modalités de coopération entre les services intégrés d’accueil et d’orientation (SIAO) et l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) pour la prise en charge des demandeurs d’asile et des bénéficiaires d’une protection internationale. Cette instruction prévoit une communication mensuelle des informations sur ces deux publics dans le parc généraliste qui devrait permettre de mieux connaître le nombre de personnes devant être réorientées vers le parc d’hébergement géré par le ministère de l’intérieur et garantir une prise en charge en rapport avec leur situation administrative.
D’autres chantiers contribueront en 2020 à structurer le secteur de l’hébergement, renforcer la connaissance du parc d’hébergement, des publics et de leurs parcours et à faire évoluer le dispositif pour apporter des réponses toujours plus adaptées. Il s’agit plus particulièrement des dispositifs suivants :
Les services intégrés d’accueil et d’orientation (SIAO) ont été renforcés. Il s’agit de plateformes d’orientation, de coordination et d’observation des besoins d’hébergement qui ont été consacrés juridiquement par la loi pour un accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) du 24 mars 2014. Alors que le réseau des SIAO souffrait de son éclatement, la mise en place d’un SIAO unique départemental s’est concrétisée en 2019. Il est également possible de créer des SIAO interdépartementaux. Ces efforts d’optimisation seront poursuivis afin d’améliorer la coordination entre les acteurs des volets urgence et insertion mais aussi pour mettre en cohérence les modalités de gouvernance des SIAO avec les axes de la stratégie « logement d’abord ». De même, le déploiement du système d’information national unique (« SI-SIAO », fourni par l’État aux gestionnaires des SIAO, aux prescripteurs et structures d’hébergement et de logements adaptés) pour assurer la gestion des demandes et des orientations vers les places d’urgence (via le 115) et des places d’insertion (via les prescriptions des services et travailleurs sociaux) sera finalisé au début de 2020 ainsi que la refonte informatique de cette application.
Les plans départementaux d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisés (PDALHPD) (issus de la loi ALUR) renforcent la planification de l’offre d’hébergement et de logement sur le territoire. A cet égard, la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018 portant sur l’évolution du logement et l’aménagement numérique (ELAN) a rendu opposables les PDALHPD pour la délivrance des autorisations d’activité pour les CHRS et subordonne l’habilitation des CHRS à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale à la conformité de la structure aux besoins identifiés dans le plan.
Il s’agira en 2020 de tirer parti de ces plans avec un état des lieux actualisé de la situation sur chaque territoire à partir des recensements réalisés et en fixant des objectifs de fluidité dans l’hébergement et le logement. L’utilisation de ces plans doit également contribuer à mieux articuler l’action et les financements de chaque acteur, notamment des collectivités dans l’exercice de leurs compétences actuelles (droit à la domiciliation des SDF, accès aux logements sociaux des publics prioritaires, accompagnement vers le logement via le fonds de solidarité pour le logement géré par les conseils départementaux, etc.).
Les conventions pluriannuelles d’objectifs et de moyens (CPOM) servent également à la mise en œuvre des objectifs de la stratégie « logement d’abord ». La loi ELAN a ainsi prévu aux termes de l’article 125 que les CHRS devront faire l’objet d’une mise sous CPOM au plus tard au 1er janvier 2023. Outre les objectifs d’efficience et de performance attendus à travers la démarche de contractualisation, la généralisation des CPOM peut contribuer à faire évoluer l’offre et à l’adapter aux besoins identifiés au niveau local (à travers la méthode des « diagnostics à 360° » et des PDALHPD). La restructuration de l’offre d’hébergement et des modes d’accompagnement pourra donner lieu à un plan d’humanisation de certaines structures afin de les adapter à l’accueil des familles, à la transformation de l’hébergement en logements ou en structures mixtes, ou en faisant évoluer des structures collectives en hébergement en diffus avec un accompagnement « hors les murs ».
Des outils d’observation sociales existants dont le contenu doivent être mieux exploités et coordonnés :
Les instruments d’observation sociale (enquêtes statistiques, SI SIAO, comptages des publics lors des nuits de la solidarité) fournissent des informations qui devront être mieux exploitées à l’avenir.
Le système d’information « ENC-AHI » (enquête nationale des coûts dans le secteur de l’accompagnement, hébergement et insertion) alimenté par une enquête annuelle auprès des gestionnaires du secteur hébergement. Ce système d’information apporte des données fiabilisées et des éléments d’appréciation utiles au dialogue de gestion entre l’État et les opérateurs de l’hébergement. Dans une logique de responsabilisation et de contractualisation pluriannuelle, le renseignement de l’enquête par les opérateurs a été rendu obligatoire en 2018, ce qui permettra de documenter les modalités et le coût de la prise en charge des publics et afin de faire évoluer l’offre de prise en charge.
La fixation de « tarifs plafonds » établis par groupes homogènes d’activité et de missions (GHAM) identifiés dans l’ENC pour les centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) prévue dans le cadre de la loi de finances pour 2018 a été mise en place pour la campagne tarifaire 2019. Il s’agit d’une convergence tarifaire visant à plus d’équité dans la répartition des ressources. La convergence s’effectuera progressivement jusqu’en 2021.
Acteurs et pilotage du programme
Le pilotage du programme ainsi que l’animation interministérielle et partenariale des politiques de lutte contre l’exclusion, dont la politique d’accueil, d’hébergement et d’insertion constitue un axe majeur, sont confiés à la direction générale de la cohésion sociale (DGCS). Elle travaille en étroite coordination avec le délégué interministériel pour l’hébergement et l’accès au logement des personnes sans abri ou mal logées (DIHAL), le délégué interministériel à la prévention et la lutte contre la pauvreté (DIPLP) et la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP). Elle exerce ses missions, en s’appuyant notamment sur le secrétariat du comité interministériel de lutte contre l’exclusion (CILE), le conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE) et en participant aux travaux de l’Observatoire national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion (ONPES).
Récapitulation des objectifs et indicateurs de performance |
Objectif | Améliorer la qualité de l'offre de services pour les personnes les plus vulnérables |
Indicateur | Taux de réponse positive du SIAO (service intégré d'accueil et d'orientation) aux demandeurs d'hébergement et de logement |
Indicateur | Part des personnes sortant de CHRS qui accèdent à un logement |
Indicateur | Proportion de places en logement accompagné par rapport au nombre de places d'hébergement (HI + HS + HU) |
Objectif | Améliorer l'efficience de l'offre de services pour les personnes les plus vulnérables |
Indicateur | Suivi de la contractualisation pluriannuelle entre les opérateurs locaux et l'État |