Philippe ERRERA |
Directeur général des affaires politiques et de sécurité |
Responsable du programme n° 105 : Action de la France en Europe et dans le monde |
Le contexte mondial est demeuré en 2021 particulièrement instable et imprévisible, marqué tant par les effets persistants de la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 sur le fonctionnement de la communauté internationale, que par une montée en puissance des rivalités entre puissances, une aggravation de certaines crises et une multiplication des foyers de tension, notamment en Europe et en Asie. Bien que son fonctionnement ait continué d’être affecté en 2021 par la crise sanitaire, le réseau diplomatique français s’est pleinement mobilisé pour garantir la sécurité de nos compatriotes et préserver la stabilité internationale, en œuvrant à maintenir une approche coopérative au sein de la communauté internationale. C’est sous couvert de ces objectifs et avec la volonté de continuer dans le même temps à promouvoir les droits de l’Homme, la démocratie et la justice internationale que la France a poursuivi en 2021 ses efforts en faveur i) de la préservation de la paix et du règlement des crises internationales, ii) de la souveraineté et de l’unité d’une Europe plus protectrice et iii) de la réforme du système de gouvernance internationale.
1) La France a tout d’abord agi en faveur de la paix et de la sécurité internationales dans le cadre onusien, notamment à l’occasion de sa présidence du Conseil de sécurité en juillet, en saisissant cette opportunité pour faire adopter des textes ou poser des actes appelés à y contribuer (adoption de la résolution renouvelant le régime de sanctions en RCA, adoption d’une déclaration concernant Varosha, organisation de réunions sur la Libye, la protection de l’espace humanitaire et la situation au Tigré), ainsi qu’en étant fortement engagée sur des thématiques au cœur de l’action de l’ONU en faveur de la paix et du développement. Ainsi, la France a continué d’agir pour les droits des femmes et s’est notamment mobilisée sur la question de l’égalité femmes-hommes, en co-présidant avec le Mexique le Forum Génération Egalité, organisé à Paris du 30 juin au 2 juillet sous l’égide d’ONU Femmes. Plus largement, la défense des droits de l’Homme et du droit international humanitaire ont aussi continué de guider l’action diplomatique de la France en 2021, avec comme priorités la lutte contre l’impunité des crimes, notamment en zone syro-irakienne, la protection des défenseurs des droits et la préservation de l’accès des citoyens à une information libre, plurielle et fiable.
Dans le champ spécifique de la sécurité, il est à noter que dans le prolongement du lancement en 2019, à l’initiative de la France, d’un processus de réflexion sur l’avenir de l’OTAN, l’agenda « OTAN 2030 », destiné à mettre à jour le concept stratégique de l’Alliance, a été adopté en juin. La France est par ailleurs demeurée particulièrement active dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, compte tenu de la persistance de la menace du terrorisme sur ses intérêts. Outre la poursuite de ses efforts pour continuer de mobiliser la communauté internationale contre le financement des groupes terroristes et l’utilisation d’internet à des fins terroristes, la France a ainsi continué de contribuer activement aux efforts de la Coalition internationale contre Daech et procédé à l’ajustement de son engagement au Sahel, face à l’instabilité du Mali et à la résilience de la menace terroriste, en appui des pays de la région comme en soutien des pays du Golfe de Guinée, de plus en plus directement menacés. C’est dans ce contexte qu’a notamment été inaugurée en juin l’Académie internationale de lutte contre le terrorisme d’Abidjan.
En parallèle, la France a œuvré activement à la recherche de solutions politiques à plusieurs crises graves.
La France a continué tout au long de l’année 2021 de mobiliser tous ses efforts, aux côtés de ses partenaires britannique et allemand (E3), pour préserver l’Accord de Vienne sur le nucléaire iranien (Plan d’Action Global Commun - PAGC), fragilisé par le retrait des États-Unis le 8 mai 2018 et le rétablissement subséquent de leurs sanctions contre l’Iran, qui de son côté a amorcé depuis juillet 2019 un désengagement progressif de ses obligations au titre l’Accord. Les efforts diplomatiques de haut niveau menés par la France ont permis une reprise ces derniers mois, de négociations substantielles à Vienne, avec l’objectif de parvenir à une solution négociée qui permette le retour de l’Iran au plein respect de ses engagements au titre du PAGC, et le retour des États-Unis dans l’Accord. Elle œuvre également, en lien avec ses partenaires E3 à une désescalade des tensions dans la région, restant convaincue de la nécessité de répondre à nos autres sujets de préoccupations dans la région, qu’il s’agisse du programme de missiles et de drones de l’Iran et de ses activités régionales déstabilisantes.
En Libye, la France a continué à appuyer les efforts des Nations Unies pour mettre fin au conflit en cours et parvenir à une solution politique, indispensable pour stabiliser le pays et lutter durablement contre le terrorisme et les trafics de migrants, en organisant en novembre à Paris une conférence internationale, destinée à renforcer la mobilisation des acteurs libyens et des partenaires internationaux en faveur de l’organisation d’élections et du retrait des forces étrangères. En Irak, la France a, dans le prolongement de la conférence de Bagdad d’août 2021, poursuivi ses efforts pour accompagner ce pays dans la réponse aux défis auxquels il fait face en matière de sécurité, de stabilisation, de reconstruction, de réconciliation nationale et de mise en œuvre d’une gouvernance inclusive. En Syrie, la France a continué à appuyer les efforts des Nations Unies, au Conseil de sécurité et en lien avec tous les acteurs concernés, en vue de la mise en place d’un processus politique de résolution de la crise syrienne, conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité des Nations Unies, seule voie pour lutter durablement contre Daech, mettre fin à la guerre civile et permettre le retour volontaire des personnes réfugiées et déplacées. S’agissant du conflit israélo-palestinien, l’action de la France en faveur du processus de paix est demeurée concentrée sur la réaffirmation des paramètres internationaux et un soutien sur le terrain à la solution des deux États. Par ailleurs, la France a continué de se mobiliser face à la crise économique et politique traversée par le Liban en appuyant la tenue d’élections et en organisant en août une nouvelle conférence de soutien.
Outre son investissement au Sahel et en Afrique de l’Ouest, à titre bilatéral comme pour entretenir la mobilisation de la communauté internationale en faveur de la sécurité et du développement des pays de la région, la France s’est mobilisée pour continuer d’aider les Etats et les populations les plus vulnérables du continent africain à faire face aux conséquences économiques et sociales de la crise sanitaire, en favorisant notamment, à travers la tenue du Sommet sur le financement des économies africaines en mai, la relance des investissements en Afrique. Des actions ont parallèlement été menées pour renforcer les liens avec les sociétés civiles africaines (Nouveau Sommet Afrique-France en octobre) et pour contrer les narratifs anti-français dans certains pays, via un effort spécifique en matière de diplomatie publique. En Afrique centrale, la France s’est mobilisée en faveur d’une transition inclusive au Tchad ainsi que, s’agissant de la RCA, en soutien des efforts régionaux de médiation comme du renforcement du mandat de la MINUSCA.
S’agissant du continent asiatique, c’est naturellement la crise afghane née du retrait américain du pays et de la prise de pouvoir subséquente des Talibans qui a, de par l’ampleur de ses implications, concentré en premier lieu l’attention des efforts de la diplomatie française en 2021, à commencer par la coordination des opérations d’évacuation de ressortissants français et également d’Afghans menacés à raison de leur engagement ou de leur lien avec la France. La France s’est ensuite attachée à appeler avec constance le nouveau pouvoir taliban au respect des droits de l’Homme, à la constitution d’un gouvernement représentatif et à la rupture effective des liens avec le terrorisme. La France a de même veillé à l’expression de positions constantes, fermes et coordonnées avec ses partenaires européens en réponse au coup d’État en Birmanie, à la multiplication de tirs de missiles nord-coréens et dans la gestion complexe de la relation avec la Chine (sanctions européennes suite aux violations des droits de l’Homme au Xinjiang, question taïwanaise, respect de la liberté de navigation en mer de Chine du Sud). Faisant face à l’évolution de sa relation avec l’Australie suite à l’annonce de l’alliance AUKUS, la France s’est aussi attachée à structurer et à approfondir le dialogue avec ses partenaires asiatiques, au premier rang desquels l’Inde, l’Indonésie ou encore l’ASEAN, auprès de laquelle elle a obtenu le statut de partenaire au développement de l’ASEAN.
De manière générale, la France œuvre pour la défense d’un espace indopacifique libre et ouvert, conformément aux objectifs de la stratégie nationale pour l’Indopacifique qu’elle a adoptée comme de ceux de la stratégie européenne pour l’Indopacifique dont elle a souhaité et favorisé l’adoption. Elle a en outre cherché à affirmer sa présence dans l’océan Indien, à la faveur de sa présidence de la Commission de l’Océan Indien et de son adhésion au 1er janvier à l’Association des Etats riverains de l’Océan Indien.
S’agissant de l’Europe centrale et orientale, la France est tout d’abord restée pleinement mobilisée pour maintenir un dialogue exigeant avec la Russie et, dans un contexte de montée des tensions à la faveur du renforcement militaire opéré par cette dernière à sa frontière avec l’Ukraine à partir du printemps, de continuer à tout faire pour tenter, malgré tout, de créer les conditions d’une résolution de ses différends avec les pays concernés par ses exigences vis-à-vis de l’OTAN et/ou touchant aux fondamentaux de l’architecture de sécurité européenne. La France a ainsi notamment poursuivi ses efforts dans le cadre du format Normandie (France, Allemagne, Ukraine, Russie), en vue de la mise en œuvre des accords de Minsk. Elle a dans le même temps activement participé aux travaux destinés à préparer néanmoins un paquet de sanctions économiques et commerciales pouvant être activées en cas de violation de l’intégrité territoriale de l’Ukraine par la Russie. Elle a parallèlement soutenu la mise en place de sanctions à l’encontre du régime biélorusse et continué de condamner fermement ses agissements. S’agissant enfin du Haut-Karabagh, la co-présidence française du groupe de Minsk a poursuivi, non sans difficultés, ses efforts de médiation, afin d’avancer sur les mesures humanitaires et de confiance, ainsi que sur les questions de frontière et d’accès à la région.
2) L’année 2021 a été consacrée, pour l’essentiel, à la préparation de la présidence française du Conseil de l’Union européenne du premier semestre 2022, avec comme objectifs principaux d’affermir la souveraineté et l’unité de l’Union européenne et d’accroître la protection qu’elle assure aux citoyens européens. Dans ce cadre ont été définies plusieurs priorités d’action autour desquelles s’est structuré le travail de préparation : renforcement de l’Europe de la Santé, via le renforcement du Centre européen de contrôle et de prévention des maladies (ECDC) ou de l’Agence européenne des médicaments (EMA), solidarité sociale (salaire minimum européen, égalité salariale homme-femme, portabilité des droits de formation entre pays, RSE, etc.), lutte contre le dérèglement climatique (paquet énergie-climat), souveraineté numérique (projets de règlement Digital Services Act et Digital Market Act, renforcement de l’autonomie stratégique (adoption de la boussole stratégique, instrument relatif aux marchés publics internationaux, règlement antisubventions, etc.), justice et affaires intérieures (réforme des règles Schengen, Pacte asile et migrations), état de droit et multilatéralisme. L’année a également été marquée par une intensification des relations bilatérales avec l’ensemble des pays européens, à commencer par l’Allemagne, dans le contexte du changement d’équipe gouvernementale opéré à l’issue des élections législatives de septembre, et le Royaume-Uni, dans le cadre des efforts conduits pour reconstruire la relation franco-britannique post-Brexit. La France a enfin œuvré à la mise en place d’une stratégie européenne d’influence dans le système multilatéral (élection des dirigeants, placement des personnels européens, valorisation des contributions financières de l’UE aux organisations internationales).
3) La France a continué en 2021 d’agir pour renforcer le système multilatéral, en le rendant plus réactif et plus efficace, à la lumière des enseignements pouvant être tirés de la gestion de la crise sanitaire engendrée par la pandémie de Covid-19, plus à même enfin de répondre aux défis multiples et d’intensité croissante auxquels la communauté internationale doit faire face. La France a ainsi continué d’appuyer les réformes portées par le Secrétaire Général des Nations Unies, pour améliorer la coordination des multiples entités onusiennes et renforcer la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, pour renforcer la confiance dans le maintien de la paix et en améliorer les performances, enfin pour moderniser et rationaliser les procédures de gestion de l’Organisation. Elle a, au service de cette ambition, veillé à être un contributeur exemplaire au budget régulier des Nations unies, tout en accroissant son effort financier sur des thématiques prioritaires pour ses intérêts. La France a aussi cherché à conforter cette action en faveur d’un multilatéralisme rénové en continuant de mobiliser ses partenaires au sein de l’Alliance pour le Multilatéralisme (APM) qu’elle a lancée avec l’Allemagne, regroupant aujourd’hui la moitié des États membres de l’ONU et dont les trois réunions organisées en 2021 ont permis de faire émerger des propositions consensuelles sur la promotion des systèmes alimentaires durables (coalition pour l’agro-écologie) et sur le renforcement de l’architecture multilatérale de santé, à la suite desquelles la France a, lors de l’Assemblée mondiale de la Santé en décembre, soutenu l’ouverture de négociations d’un traité international sur les pandémies.
Récapitulation des objectifs et des indicateurs de performance
Objectif 1 : Renforcer la sécurité internationale et la sécurité des Français
Indicateur 1.1 : Accroître la sécurité de la France au travers de celle de nos partenaires
Indicateur 1.2 : Veiller à la sécurité des Français à l'étranger
Objectif 2 : Promouvoir le multilatéralisme et agir pour une Europe souveraine, unie, démocratique
Indicateur 2.1 : Optimiser l'effort français en faveur du maintien de la paix
Indicateur 2.2 : Dossiers préparés dans le cadre des échéances européennes et des échanges bilatéraux
Indicateur 2.3 : Promouvoir les objectifs environnementaux à l'international
Objectif 3 : Assurer un service diplomatique efficient et de qualité
Indicateur 3.1 : Part des bénéficiaires de l'obligation d'emploi prévue par la loi n° 87-517 du 10 juillet 1987
Indicateur 3.2 : Efficience de la fonction support
Indicateur 3.3 : Efficience de la gestion immobilière
Indicateur 3.4 : Respect des coûts et délais des grands projets d'investissement
Indicateur 3.5 : Efficience de la fonction achat