Jean-François Hebert |
Directeur général des patrimoines et de l'architecture |
Responsable du programme n° 175 : Patrimoines |
Le programme 175 « Patrimoines » finance les politiques publiques destinées à préserver, enrichir, mettre en valeur et rendre accessible au public le plus large, le patrimoine dans toutes ses composantes (matériel et immatériel, muséal, monumental, urbain, paysager, archéologique comme archivistique), ainsi que l’architecture. L’ensemble des services et établissements du programme (administration centrale, services déconcentrés, services à compétence nationale et opérateurs) contribuent à la réalisation de ces objectifs.
Poursuite de la mobilisation d’ampleur pour répondre aux conséquences de la crise sanitaire
L’État et le ministère de la Culture ont prolongé les dispositifs de soutien pour endiguer les effets de la crise et aider le secteur culturel à y faire face, en mobilisant des moyens importants pour le secteur du patrimoine. Les crédits du plan de relance pour le secteur de l’architecture et du patrimoine (641 M€ en 2021 et 2022) ont permis d’accompagner cette mobilisation.
Le ministère de la Culture a soutenu et accompagné les opérateurs dans un contexte de reconquête des publics. Après deux années marquées par la pandémie de Covid‑19, l’année 2022 est la première sans aucune période de fermeture depuis 2019. La fréquentation des institutions patrimoniales connaît une forte reprise malgré les effets prolongés de la crise sanitaire début 2022. La fréquentation totale s’établit à 42,7 millions de visites en 2022 contre 18 millions en 2021 soit une hausse de 137 %. La fréquentation du mois de décembre 2022 est supérieure de 28 % par rapport à celle de décembre 2019.
Le chantier de restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris s’est poursuivi en 2022 en vue de sa réouverture fin 2024
À la suite de l’opération de sécurisation et de consolidation achevée à l’été 2021 (150 M€), les travaux en cours sous la maîtrise d’ouvrage de l’établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris (EP-RNDP) concernent la restauration des parties de l’édifice détruites ou dégradées par l’incendie et les autres travaux nécessaires à la réouverture de la cathédrale (restauration intérieure, reconstitution de la charpente et de la couverture de la flèche, du transept, de la nef et du chœur, reconstitution des voûtes effondrées, etc.). L’essentiel des marchés de travaux liés à cette opération ont été notifiés en 2022 ; leur coût est estimé à 552 M€. La restauration des extérieurs de la cathédrale se poursuivra après la réouverture.
Tout au long de l’année 2022, la DGPA a renforcé son action au bénéfice des territoires, des publics et des communautés professionnelles
Dans le domaine des monuments historiques, l’année 2022 a été marquée par la poursuite des différents mécanismes de financement innovants précédemment mis en place :
Le fonds incitatif pour le patrimoine (FIP), financement partenarial pour les monuments historiques situés dans les communes à faibles ressources mis en place en 2019, a depuis permis de financer près de 700 opérations, dont 124 en 2022, (ex. la restauration des intérieurs de l’église Saint-Pierre à Plounévez-Moëdec dans les Côtes-d’Armor en 2022), pour un soutien du ministère de la Culture s’élevant à plus de 65 M€. Près des trois quarts des opérations concernent des communes de moins de 2 000 habitants ;
Pour la 5e édition du « loto du patrimoine », le ministère de la Culture a contribué au côté de la Fondation du patrimoine à la restauration des 460 immeubles protégés au titre des monuments historiques sélectionnés depuis 2018, dont 64 en 2022 (ex. la sécurisation des pieds des chevalements miniers à Oignies dans le Pas-de-Calais en 2022), grâce au dégel annuel exceptionnel de la réserve de précaution des crédits du programme 175, à hauteur de la TVA applicable au loto (15 M€ en 2022).
Au-delà de ces deux dispositifs, les deux tiers du budget des monuments historiques (soit 230 M€ en CP) ont été délégués au niveau déconcentré, permettant la poursuite de projets d’ampleur :
Pour les monuments appartenant à l’État, le ministère de la Culture a consacré près de 40 M€ aux travaux qu’il mène dans les 87 cathédrales dont il a la charge (ex. les travaux sur la grande flèche d’Alavoine de la cathédrale Notre-Dame de Rouen). À cela s’ajoutent des crédits supplémentaires pour la réalisation des actions prévues par le plan « sécurité cathédrales » (ex. l’extension de la détection incendie à la cathédrale Saint-André de Bordeaux), lancé après l’incendie de Notre-Dame de Paris et dont l’objectif est de renforcer le niveau de sécurité des cathédrales en mettant en œuvre des mesures adaptées aux spécificités de chaque édifice (24 M€ depuis 2020) ;
Dans le cadre du protocole Culture-Défense (2005), le ministère de la Culture consacre 3,68 M€ par an à la restauration de monuments classés monuments historiques affectés au ministère des Armées. L’année 2022 a vu notamment la poursuite des travaux sur la citadelle de Lille et les fortifications de Brest et l’achèvement des travaux de restauration de l’intérieur de la redoute Saint-Denis à La Réunion ;
Les interventions sur le patrimoine mobilier ont concerné les trésors d’églises ou de cathédrales, les tableaux, sculptures, retables et tapisseries et les instruments de musique (ex. travaux en cours sur les orgues des cathédrales de Paris, Reims et Amiens) ;
La politique d’accompagnement des propriétaires d’édifices protégés s’est également poursuivie, qu’il s’agisse de collectivités (ex. la restauration de la prison circulaire d’Autun en Saône-et-Loire, pour l’extension du musée Rolin) ou de propriétaires privés (ex. la restauration des couvertures et des parties hautes du corps de logis du château de Villegongis dans l’Indre).
De plus, l’État mobilise ses grands opérateurs nationaux pour la restauration de ses monuments en région. Le Centre des monuments nationaux (CMN) a mené notamment le chantier de restauration du château royal de Villers-Cotterêts (Aisne) qui abritera la Cité internationale de la langue française (ouverture en 2023), et de nombreuses opérations de restauration telles que celle de la chambre de l’Évêque au château de Carrouges ou de l’aile Sarcus au château de Bussy-Rabutin. L’Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (OPPIC) a piloté des opérations de restauration dans les châteaux et domaines nationaux, dont celle des façades extérieures du château de Saint-Germain-en-Laye, achevée en avril 2022 après huit années de travaux.
Dans le domaine de l’architecture, afin de disposer d’une meilleure connaissance de la filière, l’observatoire de l’économie de l’architecture, a été pleinement mis en œuvre en 2022 : création d’un comité d’orientation, d’un conseil scientifique et de 4 commissions thématiques, adoption d’une charte de fonctionnement, journée annuelle de restitution des travaux de l’observatoire en décembre 2022. Parallèlement, la connaissance et l’accès des acteurs du secteur de l’architecture aux dispositifs de financement des industries culturelles et créatives ont été renforcés.
Face à une concurrence internationale frappant la filière française de l’architecture, la relance d’une stratégie partenariale et interministérielle de soutien à l’exportation a été mise en œuvre. A l’occasion de la présidence française de l’Union européenne au premier semestre 2022, une réunion des directeurs européens de l’architecture a été organisée par le service de l’architecture de la DGPA à la Cité de l’architecture et du patrimoine et a fourni l’occasion d’échanger sur les bonnes pratiques en matière de politique architecturale au niveau européen.
S’agissant de la promotion d’une architecture de qualité, l’appel à manifestation d’intérêt intitulé « Engagés pour la qualité du logement de demain », porté par le ministère de la culture ainsi que le ministère chargé du logement et lancé en octobre 2021, a permis de désigner 97 équipes lauréates – dont 20 bénéficient d’un programme d’incubation –, choisies en fonction de leur capacité à concevoir des logements abordables conciliant qualité architecturale, qualité d’usage et sobriété écologique.
La poursuite du développement du label « Architecture contemporaine remarquable » a contribué à renforcer la reconnaissance de l’héritage architectural de moins d’un siècle pour en assurer la valorisation et l’adaptation aux enjeux contemporains et aux attentes des citoyens.
Enfin, les directions régionales des affaires culturelles (DRAC) ont poursuivi leurs actions de valorisation et de diffusion de l’architecture en région.
Dans le domaine des archives l’année 2022 a été marquée par :
la poursuite du développement de l’archivage numérique avec le soutien au programme interministériel VITAM et à l’offre de service Vitam accessible en service pilotés par le ministère de la culture, le soutien aux ministères et aux collectivités pour augmenter les versements d’archives nativement numériques (SOLON, juridictions administratives, matrice numérique, INSEE, applications relative à la gestion des étrangers et des naturalisations), ou encore l’accompagnement des projets de dématérialisation (autorisations d’urbanisme, gestion des étrangers, gestion des dossiers de carrière) ;
la poursuite de l’accès aux archives en ligne, le développement du portail France-Archives et de la découvrabilité des ressources archivistiques sur les réseaux, en s’appuyant sur les outils de l’intelligence artificielle ;
l’ouverture des archives (dérogations générales, guides de recherche en ligne), en lien aux actuels enjeux mémoriels (Algérie, Cameroun, esclavage et traite négrière) ;
l’accélération des démarches de conservation préventive, d’élaboration des plans de sauvegarde des biens culturels ;
le projet de l’extension des Archives nationales sur le site de Pierrefitte-sur-Seine permettant d’augmenter de 100 kilomètres linéaires la capacité d’accueil des archives papier par les Archives nationales, suite au sinistre ayant entraîné la fermeture du site de Fontainebleau, ainsi que la poursuite du schéma directeur des archives nationales sur le site parisien ;
la poursuite des soutiens aux rénovations ou extensions de bâtiments d’archives des collectivités en priorisant les enjeux de transition énergétique.
Dans le domaine des musées, le ministère a accompagné le retour progressif des publics dans les établissements dans un contexte post-pandémique. Le ministère s’est également mobilisé pour accompagner les musées pour les enjeux de la transition écologique et de la sobriété énergétique.
Le ministère a également voulu réinterroger la sécurisation des procédures d’acquisitions des musées nationaux en s’appuyant sur une mission confiée à trois personnalités. Il a, par ailleurs poursuivi, au cas par cas, l’instruction des demandes de restitution de biens culturels adressées à la France. Plusieurs importantes opérations d’investissement sont en cours (Grand Palais des Champs-Élysées, château de Fontainebleau, etc.) ou sont arrivées à leur terme dans le courant de l’année, permettant l’inauguration après rénovation d’établissements nationaux comme le musée de Cluny – musée national du Moyen-Âge ou d’institutions territoriales telles que le musée et les jardins départementaux Albert-Kahn de Boulogne-Billancourt, le musée archéologique du lac de Paladru à Charavines, le musée Mathurin Méheut à Lamballe ou le musée du Gévaudan à Mende.
Enfin, le ministère s’est employé à pleinement jouer son rôle d’animation des réseaux scientifiques et professionnels au travers d’événements tels que le colloque international consacré à l’avenir des musées en Europe organisé à l’occasion de la présidence française du conseil de l’Union européenne.
Dans le domaine de l’archéologie, le ministère accompagne les opérateurs d’archéologie préventive dans un contexte toujours marqué par le dynamisme de l’activité de diagnostics et de fouilles, stimulée par l’activité d’aménagement. En matière de diffusion et de valorisation, l’adhésion des publics assure le succès des journées européennes de l’archéologie entre autres et des journées du patrimoine. Les activités de médiation scientifique, d’accueil des publics sur le terrain et de programmes d’éducation artistique et culturelle trouvent toute leur place dans la politique de diffusion et de valorisation de la recherche archéologique. En matière d’archéologie sous-marine, 2022 est marquée par la mise à flot du nouveau navire hauturier du DRASSM, l’Alfred Merlin qui a assuré ses premières missions.
Dans le domaine du patrimoine culturel immatériel, le ministère de la Culture travaille au renforcement et à l’animation des réseaux d’acteurs (soutien aux actions de formation, de recherche et de diffusion).
Dans le domaine du patrimoine mondial, la DGPA mène des actions d’assistance préparatoire de candidatures à l’inscription sur la Liste du patrimoine mondial, d’assistance technique et de suivi de l’état de conservation des sites inscrits, ainsi que des actions de formation.
En ce qui concerne la recherche, le soutien à la Fondation des sciences du patrimoine s’est poursuivi, avec une forte implication du Centre de recherche et de restauration des musées de France (C2RMF) et du laboratoire de recherche des monuments historiques (LRMH). La DGPA cherche à mettre en avant toutes les initiatives et projets pour développer l’écosystème des sciences du patrimoine.
Récapitulation des objectifs et des indicateurs de performance
Objectif 1 : Améliorer la connaissance et la conservation des patrimoines
Indicateur 1.1 : Part des crédits de conservation préventive par rapport aux crédits de restauration des monuments historiques
Indicateur 1.2 : Archéologie préventive : Proportion des dossiers d'aménagement reçus faisant l'objet d'un arrêté de prescription de diagnostic et/ou d'un arrêté de prescription de fouilles préventives
Indicateur 1.3 : Qualité de la maîtrise d'ouvrage Etat
Objectif 2 : Accroître l'accès du public au patrimoine national
Indicateur 2.1 : Fréquentation des institutions patrimoniales et architecturales
Indicateur 2.2 : Accessibilité des collections au public
Indicateur 2.3 : Taux de satisfaction du public des institutions et des sites patrimoniaux
Objectif 3 : Elargir les sources d'enrichissement des patrimoines publics
Indicateur 3.1 : Effet de levier de la participation financière de l'Etat dans les travaux de restauration des monuments historiques qui ne lui appartiennent pas
Indicateur 3.2 : Taux de ressources propres des institutions patrimoniales et architecturales