Stanislas BOURRON |
Directeur général des collectivités locales |
Responsable du programme n° 112 : Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire |
Depuis plusieurs décennies, la France a connu d’importantes mutations du fait de la métropolisation et de la périurbanisation, qui ont entraîné un délaissement des villes petites et moyennes ainsi qu’une une perte d’attractivité des territoires ruraux. Dans ce contexte, l’enjeu pour l’État est d’accompagner les collectivités locales les plus fragiles, d’assurer une égalité d’accès des habitants à un socle de services fondamentaux et, enfin, de veiller aux meilleures synergies entre les territoires.
Cet enjeu de cohésion est essentiel, à l’heure où l’économie française est engagée dans une transformation profonde, dictée par les impératifs de la transition écologique et énergétique, dans un contexte marqué par les effets de la dernière crise sanitaire, mais également par les défis soulevés par l’actualité internationale.
Dans ce cadre, le programme 112 « Impulsion et coordination des politiques d’aménagement du territoire » concourt à la réalisation de trois objectifs principaux :
1- Inscrire le partenariat avec les collectivités dans la durée au travers de contrats territoriaux pluriannuels et globaux
Le partenariat contractuel avec les territoires constitue un outil essentiel de l’aménagement du territoire.
Après la finalisation des signatures des contrats en 2022 (à l’exception de la Corse et de la Normandie, dont les contrats seront signés en 2023), l’année 2023 sera celle de la poursuite de la mise en œuvre de la génération 2021-2027 des contrats de plan État-régions (CPER) et des contrats de plan interrégionaux (CPIER) de fleuves et de massifs, ainsi que des contrats territoriaux infra-régionaux, au premier rang desquels les contrats de relance et de transition écologiques (CRTE).
L’actuelle génération des CPER repose sur une approche ascendante et différenciée, les thématiques contractualisées étant adaptées aux enjeux de chaque région. Les contrats peuvent en outre définir les principes et les modalités conjoints de leurs actions en faveur de la relance économique, d’une plus grande résilience des territoires et d’une transition vers une économie bas carbone. Ils permettent également d’améliorer l’articulation entre les différents types de contrats, en partant des projets de territoire, en favorisant une approche interministérielle, et en rassemblant les dispositifs d’intervention de l’État, tels les programmes de l’agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), dans un contrat commun.
Par ailleurs, le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires poursuivra, en 2023, le soutien aux pactes de développement territorial, spécifiques aux territoires les plus fragiles.
Ces pactes visent à mieux coordonner l’action des pouvoirs publics (État, collectivités, opérateurs publics, Banque des territoires de la Caisse des dépôts et consignations), mais aussi des acteurs économiques et sociaux autour de la mise en œuvre de projets stratégiques partagés à même d’enclencher et de soutenir une dynamique de rebond. Ils agrègent des financements de type DSIL (dotation de soutien à l’investissement local), DETR (dotation d’équipement des territoires ruraux) et FNADT (fonds national d’aménagement et de développement du territoire), et ceux provenant d’autres ministères, offrant ainsi plus de cohérence, de force et de lisibilité à l’action de l’État dans ces territoires. Le financement de ces pactes, conclus notamment dans le territoire de la Sambre-Avesnois-Thiérache ou encore dans le bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais sera poursuivi en 2023.
Il convient également de citer les contrats de relance et de transition écologique (CRTE) lancés en 2021 et qui ont vocation à constituer la déclinaison territoriale des CPER. Signés pour six ans, ces contrats intégrateurs consistent à accompagner les projets de tous les territoires (ruraux, urbains, ultramarins) en regroupant les dispositifs d’accompagnement de l’État à destination des collectivités territoriales, dispositifs soutenus en 2021 et 2022 par les crédits du plan France Relance.
Enfin, l’État poursuit son action en faveur des territoires concernés par le redéploiement des implantations territoriales des armées à travers les contrats de redynamisation de site de défense (CRSD) destinés à recréer des emplois et d’activité économique comparable à celui supprimé sur le territoire en cause. Au 1er août 2022, sur les 62 contrats signés, 58 contrats (28 CRSD et les 30 plans locaux de redynamisation (PLR)) sont arrivés à échéance et ont fait l’objet d’une clôture administrative. Sur les quatre contrats restants, deux seront clos d’ici la fin de l’année 2022 (Creil et Drachenbronn) et la clôture des deux derniers (Châteaudun 2 et Polynésie française) interviendra plus tardivement. Le CRSD de Polynésie française a fait l’objet d’un avenant de prolongation jusqu’au 11 juillet 2024, afin de prendre en compte les orientations du Président de la République visant à la prise en charge des coûts de dépollution des sites.
2- Accompagner les grandes transformations territoriales au travers du déploiement de programmes d’appuis spécifiques
Aujourd’hui, la politique d’aménagement est prioritairement orientée vers les centres urbains intermédiaires, les territoires ruraux et les territoires périurbains. Cette action de l’État vers ces territoires s’exprime notamment à travers :
- Le programme France Services : lancé par le Président de la République le 25 avril 2019, le déploiement du dispositif France Services, identifié comme réforme prioritaire, a été concrètement mis en œuvre dès 2020. Avec 2 375 structures labellisées France Services au 1er septembre 2022, la fin de l’année verra l’achèvement du déploiement du dispositif et l’objectif de 2 543 structures sur tout le territoire sera même dépassé. La poursuite du développement qualitatif du programme sera également un enjeu central. France Services permet de renforcer l’offre et la qualité de services aux publics et au plus près des territoires : les usagers sont accompagnés dans l’ensemble de leurs démarches. En lien avec neuf partenaires (CAF, Pôle Emploi, CNAM, CNAV, MSA, CNAM, ministère de l’Intérieur, direction générale des finances publiques, La Poste), et, depuis 2021, le ministère de la Justice sont présents au sein des France Services. L’accompagnement des usagers ne consiste pas en une simple réorientation, mais il comprend un engagement à la résolution concrète des difficultés rencontrées.
- L’Agenda rural : Le Premier ministre a annoncé le lancement de l’Agenda rural à l’occasion du Congrès des maires ruraux en septembre 2019. Co-construit avec les élus des territoires ruraux et inspiré du rapport Ruralités : une ambition à partager », l’Agenda rural répond à l’ambition gouvernementale de réduire les inégalités territoriales et d’élaborer des mesures en faveur des territoires ruraux, qui s’inscrivent dans la durée. Trois ans après son lancement, 94 des mesures portées par l’Agenda rural ont été réalisées et 79 sont en cours de réalisation.
Le programme « Petites Villes de demain » est l’une des mesures phares de l’Agenda rural. Ciblant les communes de moins de 20 000 habitants qui exercent des fonctions de centralité et présentent des signes de fragilité. 1642 communes sont accompagnées depuis le lancement du programme en 2020 et 700 M€ ont déjà été engagés, soit 23 % des financements prévus (3 Md € d’ici 2026). Le programme prévoit un appui complet pour une accélération des projets : en ingénierie de projets avec notamment le co-financement d’un poste de chef de projet (objectif de 900 recrutements), la mobilisation de partenaires et l’insertion dans le club des PVD.
Autre mesure de l’Agenda rural, le volontariat territorial en administration est un dispositif permettant à de jeunes diplômés de niveau bac +2 minimum d’effectuer une mission de 12 à 18 mois au service du développement des projets de territoires ruraux.
- Le programme « Nouveaux lieux, nouveaux liens » : il propose de nouvelles activités et services regroupés dans des lieux entièrement équipés en numérique, en soutenant ceux qui créent, inventent et portent ces nouvelles activités. Des partenaires publics et privés (par exemple tiers-lieux, espaces de co-working, etc.) y sont impliqués. Par ailleurs, suite au comité interministériel sur les tiers-lieux de juin 2020, le MTECT participera, à travers la mobilisation de l’ANCT, au déploiement des manufactures de proximité, tiers-lieux de production, qui contribuent à la relance de l’activité économique et à la relocalisation de la production dans les territoires. Les manufactures de proximité sont financées dans le cadre du plan France relance.
- Le programme « Territoires d’industrie » : ciblé sur 148 territoires, ce programme répond à une double ambition : économique tout d’abord pour relancer l’industrie française, soutenir ses capacités d’innovation et de conquête de nouveaux marchés, mais également d’aménagement du territoire. En effet, soutenir les entreprises industrielles dans les territoires ruraux, périurbains, et les petites et moyennes villes, permet de renforcer leur attractivité (emploi, nouveaux habitants), et de favoriser le développement des services dans les territoires
- Le plan « Action Cœur de Ville » : lancé en décembre 2017, Action cœur de ville est un programme national destiné à renforcer et développer l’attractivité des villes « moyennes », en faisant le choix d’investir prioritairement dans la revitalisation des centres-villes. Dans cette perspective, le programme prévoit la mobilisation de 5 Md€ sur cinq ans et accompagne 222 territoires. En 2022, 4,39 Md€ ont été engagés dont 409 M€ pour l’État. Cette somme s’est déjà matérialisée au travers de plus de 6 000 actions concrètes qui ont été lancées depuis 2018 (56 820 logements ont bénéficié de subventions de l’Anah, 71 666 logements ont bénéficié de MaPrimeRenov, 133 villes ont bénéficié du soutien du Fonds friches).
Enfin, participent à cette action les plans « France Très Haut Débit » (100 % des Français équipés en très haut débit d’ici à 2022) et « New deal mobile » (garantir une couverture mobile à 100 % des Français d’ici 2022), pilotés par l’ ANCT, ainsi que la mobilisation de l’opérateur Business France pour favoriser les investissements étrangers sur tout le territoire.
3- Affirmer et développer l’appui apporté aux collectivités grâce à l’action de l’Agence nationale de la cohésion des territoires
Créée par la loi du 22 juillet 2019, l’ANCT répond au souhait des élus de disposer d’un accès plus simple à l’ingénierie des services de l’État et des différents opérateurs qui interviennent dans les territoires pour soutenir leurs projets.
En regroupant plusieurs acteurs (Commissariat général à l’égalité des territoires, Agence du numérique et Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux), et en conventionnant avec des opérateurs (Agence nationale de la rénovation urbaine, Agence nationale de l’habitat, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, et l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), l’ANCT permet de fédérer les moyens de l’État et de ses opérateurs, en complément des outils développés par les collectivités. L’ANCT agit au profit de tous les territoires, en ciblant en priorité les plus fragiles, qu’ils soient urbains ou ruraux, et en tenant compte des spécificités de chacun. L’ANCT apporte une aide « sur mesure » à travers un appui en ingénierie technique et financière, par la mobilisation et la coordination des ressources de l’État et de ses opérateurs. Son organisation est largement déconcentrée puisque les préfets de département en sont les délégués territoriaux et que l’agence intervient lorsque les moyens nécessaires ne sont pas disponibles au niveau local (logique de subsidiarité).
L’ANCT déploie les grands programmes nationaux d’intervention, d’aménagement numérique et mobile, de revitalisation des centres-villes ou encore d’accès aux services, afin de soutenir les projets portés par les collectivités. Elle intervient également en appui spécifique aux territoires en transition économique, écologique ou démographique, en particulier à travers la mobilisation d’une ingénierie au service des projets des collectivités.
La situation actuelle appelle à la poursuite des interventions menées par l’ANCT auprès des collectivités territoriales, dans les territoires les plus fragilisées par la crise. L’année 2023 verra ainsi l’ANCT continuer la déclinaison des programmes qu’elle pilote, le cas échéant financés dans le cadre du plan de relance (pilotage du fonds de restructuration des locaux d’activité, plan « Avenir montagnes », stratégie nationale pour un numérique inclusif) et développer encore son offre d’ingénierie aux collectivités.
Afin d’orienter ses programmes et son action, l’agence met en œuvre des travaux d’observation des territoires et d’évaluation de la politique d’aménagement du territoire ainsi que des travaux de réflexions prospectives et stratégiques en direction des territoires, notamment en matière de transition numérique, écologique, démographique, et de mutations économiques.
Enfin, au titre de la mise en œuvre des fonds européens structurels et d’investissement (FESI), l’agence, sous l’autorité du ministre chargé de l’aménagement du territoire, assure la mission d’autorité de coordination inter-fonds d’une part et du fonds européen de développement régional (FEDER) d’autre part. Les conseils régionaux assurent leur gestion en quasi-totalité, notamment du FEDER. Ils financent les investissements sur des projets mobilisateurs de croissance intelligente (innovation, PME, TIC), durable (énergies renouvelables, efficacité énergétique) et inclusive (emploi, formation, inclusion) dans les territoires afin d’atteindre les objectifs de la stratégie du Semestre européen. L’agence est également autorité de gestion de la réserve d’ajustement du Brexit et coordonne dans sa dimension interministérielle, en lien avec le secrétariat général des affaires européennes (SGAE), l’exécution de ces crédits.
Récapitulation des objectifs et des indicateurs de performance
Objectif 1 : Soutenir la compétitivité et l'attractivité des territoires
Indicateur 1.1 : Ecart du taux de création d'entreprises dans les zones prioritaires d'aménagement du territoire par rapport à la moyenne nationale
Objectif 2 : Renforcer la cohésion sociale et territoriale
Indicateur 2.1 : Réduction du temps d'accès des usagers à une maison "France Services" et amélioration du service rendu
Indicateur 2.2 : Impact des crédits FNADT dans les dispositifs contractuels entre l’État et les collectivités locales
Objectif 3 : Renforcer les capacités stratégiques et techniques des collectivités territoriales et des acteurs dans les territoires
Indicateur 3.1 : Soutenir efficacement les collectivités en demande d’ingénierie pour accélérer leurs projets spécifiques