Alain THIRION |
Directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises |
Responsable du programme n° 161 : Sécurité civile |
Le programme 161 « Sécurité civile » porte, au sein de la mission « Sécurités », l’ensemble des politiques du ministère de l’intérieur consacrées à la protection des populations et à la gestion de crises. Il concourt à la politique interministérielle de sécurité civile dans les conditions fixées par la loi du 13 août 2004 relative à la modernisation de la sécurité civile qui prévoit que « l’État est garant de la cohérence de la sécurité civile au plan national ; il en définit la doctrine et coordonne ses moyens ». Il est mis en œuvre par la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC).
À cette fin, la DGSCGC coordonne les actions interservices ou interministérielles et définit la doctrine nationale en matière de sécurité civile.
Concrètement :
elle organise, prépare et met en œuvre les moyens nationaux d’intervention de la sécurité civile, notamment en situation de crise ;
elle définit et soutient l’action des sapeurs-pompiers et de l’ensemble des acteurs de la sécurité civile.
elle conduit la politique internationale française de sécurité civile.
elle est pleinement engagée dans la lutte contre le terrorisme.
La persistance de la menace terroriste et l’accélération des phénomènes climatiques ou plus largement des risques naturels, associés aux risques technologiques (« NaTech », ou encore menaces nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (NRBC)) rendent nécessaires l’adaptation des moyens opérationnels de la sécurité civile, la transformation, l’unification et l’interopérabilité des systèmes d’information en matière de secours et d’alerte, ainsi que le renforcement de la position centrale du ministère de l’Intérieur et des Outre-mer en matière de gestion de crise.
La saison des feux de forêts 2022 a été d’une exceptionnelle intensité et a fortement mobilisé toutes les forces de la sécurité civile sur une grande partie du territoire :
plus de 60 000 hectares brûlés (soit près de six fois plus qu’en 2021) ;
plus de 55 000 personnes déplacées pour leur mise en sécurité ;
une présence opérationnelle de 40 000 hommes/jour au plus fort de la crise ;
près de 13 000 largages réalisés par les avions et hélicoptères bombardiers d’eau.
Cela démontre la nécessité de poursuivre les réflexions stratégiques pour la sécurité civile de demain.
L’année 2023 marque ainsi l’inscription de cette ambition dans le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur (LOPMI).
La DGSCGC bénéficiera dans le cadre de cette programmation pluriannuelle (2023-2027), de la création d’emplois et de l’augmentation de ses moyens afin de renforcer les moyens opérationnels de la sécurité civile face à l’évolution rapide des risques.
Ainsi, en ce qui concerne les moyens nationaux, l’année 2023 marquera le lancement du plan de renouvellement de la flotte d’hélicoptères de la sécurité civile. Plus globalement, il s’agira d’adapter et d’accroître la capacité des moyens nationaux à répondre à l’évolution des menaces et des risques auxquels ils doivent faire face, en particulier l’accélération des bouleversements climatiques, et dans la perspective des rendez-vous internationaux de 2023 et 2024.
Les principales actions se traduiront par :
Le renforcement des moyens aériens de la sécurité civile :
l’engagement, dans le cadre de la LOPMI, d’un plan pluriannuel de renouvellement de la flotte hélicoptères dans la continuité de l’acquisition de quatre appareils de type H145 livrés en 2021 et 2022 ;
la poursuite du renforcement des flottes d’avions bombardiers d’eau avec la réception d’un 8e DASH en juin 2023. La flotte aérienne de la sécurité civile bénéficiera également, à terme, de l’acquisition de deux avions amphibie bombardiers d’eau dans le cadre du mécanisme de protection civile de l’Union Européenne ce qui permettra d’engager par ailleurs un plan de renouvellement et de renforcement de la flotte des avions bombardiers d’eau.
Le développement des capacités du groupement d’intervention du déminage qui prendra une nouvelle dimension à travers trois objectifs majeurs :
la modernisation des infrastructures et des moyens dédiés à la gestion des restes d’explosifs de guerre (transport, stockage et destruction) ;
la création d’un site dédié à leur destruction. Cette mesure qui vise à limiter les risques, sera également accompagnée du recrutement de personnels techniques qualifiés dans l’exploitation des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) et la maintenance des équipements ;
un plan de renouvellement et de renforcement des moyens opérationnels (véhicules et robots d’intervention) qui sera lancé à compter de 2023, dans la perspective des Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024.
Le lancement d’un plan de renforcement et de modernisation des capacités des Formations Militaires de la Sécurité Civile (FORMISC) face aux conséquences d’évènements climatiques de plus en plus nombreux et violents :
en vue de développer une capacité de réponse et de projection en Outre-Mer et en métropole, l’année 2023 marquera, ainsi, la première étape de la montée en puissance progressive des effectifs des FORMISC ;
la poursuite du renouvellement et de la montée en gamme du parc de véhicules et de matériels ainsi que l’acquisition de drones, de capacité de transmission opérationnelle satellitaire autonome et de matériels NRBC.
Ces mesures s’inscrivent notamment dans un contexte d’élargissement du champ de première intervention des FORMISC, lié à la récurrence d’évènements de grande ampleur au niveau national et international (les FORMISC armant 17 des 18 modules français du mécanisme de protection civile de l’Union).
En matière de préparation à la gestion des crises et d’appui aux acteurs de la crise, la DGSCGC pilote des actions interministérielles destinées à améliorer la réponse de l’État face aux crises.
Dans ce domaine, une ambition majeure de la sécurité civile vise à renforcer la position centrale du ministère de l’Intérieur dans la gestion des crises. La persistance de la menace terroriste ou l’occurrence accélérée des risques naturels rendent nécessaire la définition d’une position centrale du ministère dans la gestion des crises, comme l’organisateur incontournable de la gestion de crise au sein d’une CIC « augmentée » et grâce à des mesures de professionnalisation, d’une véritable filière des acteurs de la gestion de crise. Ainsi, les travaux en inter-service initiés en 2022 pour doter la CIC d’un état-major permanent vont se poursuivre et s’accélérer en 2023.
La LOPMI porte également le renforcement des dispositifs d’alerte des populations en insistant sur leur redondance et leur robustesse sur tous les territoires et leur transition vers une gestion numérique totalement intégrée. Il s’agit notamment :
du système d’alerte et d’information des populations (SAIP). La seconde vague d’installation débutée au second semestre de l’année 2022 se poursuivra en 2023 avec pour objectif d’atteindre d’ici à 2026, la mise en fonctionnement de 1 000 sirènes supplémentaires ;
d’autres vecteurs d’alerte en cours de déploiement comme Fr-ALERT qui permet désormais une diffusion cellulaire d’une alerte aux populations directement sur les téléphones mobiles situés dans une zone de danger imminent, avec une information précise sur le type de danger et la conduite à adopter.
En outre, plusieurs grands projets numériques relevant des politiques d’anticipation, de préparation et de gestion des crises seront poursuivis en 2023, notamment :
Le programme « NexSIS 18-112 », système d’information et de commandement unifié des services d’incendie et de secours et de la sécurité civile piloté par l’Agence du numérique de la sécurité civile (ANSC). Cet opérateur poursuivra en 2023 le déploiement et l’intégration de la maintenance des outils et services du programme « NexSIS 18-112 ». La mise en œuvre de ce projet sera complété par le développement du projet « SECOURIR » permettant la collecte et le routage décloisonné des communications d’urgence entre les différents acteurs et la mise en place d’une capacité nationale de traitement des flux d’alerte. Le financement de l’Agence par l’État est donc renforcé à partir de 2023.
Le projet « réseau radio du futur » (RRF) à la définition duquel contribue la DGSCGC aux côtés des forces de sécurité intérieure, outil de communication sécurisé, résilient, adapté aux usages actuels, reposant sur les technologies récentes et destiné à l’ensemble des services opérationnels.
Dans le domaine de la prévention, il convient de souligner le projet de mise en œuvre en 2023 de la journée annuelle de la résilience face aux risques, mais également :
Le renforcement des mesures de prévention et de lutte contre des feux plus intenses, plus fréquents et plus répandus sur le territoire national ;
La poursuite en 2023 des travaux avec des opérateurs en capacité d’affiner la survenue de nouveaux risques (glaciaires et périglaciaires) en lien notamment avec les ministères en charge de l’agriculture et de la transition écologique ;
La mise en œuvre en cours de la déclinaison réglementaire du « contrat territorial de réponse aux risques et aux effets de menace » (CoTRRiM), démarche multisectorielle de préparation à la gestion des crises. Cet outil inter-acteurs et inter-secteurs permet de disposer de l’analyse partagée des risques et des effets potentiels des menaces ainsi que des réponses capacitaires associées, optimisant ainsi l’emploi et la mutualisation des capacités en matière de gestion de crise. Les conclusions des COTTRIM d’une même zone contribueront à l’élaboration du COTTRIM zonal, celles de l’ensemble des COTTRIM zonaux à l’évaluation capacitaire nationale par risque ;
L’actualisation de la planification ORSEC (organisation territoriale de la gestion de crise, chaîne de direction et de commandement…) sous la forme de guides et de procédures mis à disposition des préfectures de zone et de département afin qu’elle corresponde aux nouveaux enjeux et prenne en compte les enseignements des crises intervenues ces dernières années ;
La mise en œuvre de la nouvelle doctrine de décompte du bilan victimaire piloté par le SGDSN au sein de la cellule interministérielle d’information et d’aide aux victimes (C2IPAV). Cette structure de réponse téléphonique, pilotée par la DGSCGC, vise à centraliser tous les appels d’une population lors d’une crise majeure et d’en assurer le suivi, en lien avec le ministère de la justice et celui de la santé et des solidarités. Elle doit également consolider le bilan victimaire de l’événement traité au profit des autorités nationales ;
Enfin, la DGSCGC poursuit l’amélioration de l’application informatique iCatNat qui dématérialise depuis 2018 la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Les évolutions engagées et à venir visent d’une part à adapter l’application informatique aux évolutions introduites par la loi n° 2021-1837 du 28 décembre 2021 réformant la garantie catastrophe naturelle et, d’autre part, à optimiser son usage par les différents utilisateurs.
S’agissant des sapeurs-pompiers et des associations agréées de sécurité civile, la DGSCGC poursuivra en 2023 son rôle de définition des normes et son soutien à ces acteurs essentiels du monde de la protection civile :
En matière de soutien aux investissements des SIS, l’État initie une nouvelle démarche de financement à travers les pactes capacitaires qui visent à optimiser, impulser et structurer l’investissement et l’innovation des territoires en matière de réponse de sécurité civile. Cette démarche permettra de faire face aux risques complexes ou émergents auxquels l’État et les collectivités territoriales sont confrontés, par l’intermédiaire des services d’incendie et de secours, tout en favorisant les synergies et les mutualisations entre les différents acteurs ;
Dans le champ de l’élaboration de la doctrine d’action des services d’incendie et de secours, le corpus doctrinal sera enrichi en matière de secours et soins d’urgence aux personnes (SSUAP) et de retour d’expérience (RETEX) dans le cadre des travaux pour faire face aux événements sportifs mondiaux de 2023 et 2024 et mieux prendre en compte toutes les formes de menaces, y compris NRBC.
Pour 2023 et les années à venir, la DGSCGC a adressé aux SIS le 6 juillet 2022 la prochaine feuille de route du SSUAP. Celle-ci précise les chantiers nationaux qui s’inscrivent dans la continuité des cinq objectifs stratégiques de la démarche :
maîtriser l’accroissement de la pression opérationnelle ;
permettre aux SIS de retrouver le contrôle réel de leurs moyens ;
faire reconnaître par l’ensemble des acteurs de la chaîne pré-hospitalière la réalité des missions accomplies par les SIS au-delà de leur mission propre et en tirer les conséquences ;
redonner du sens au métier de sapeur-pompier ;
en prospective, anticiper l’organisation des SIS et le métier de sapeur-pompier à 10 ans.
La loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels constitue une avancée importante pour les SIS, permettant notamment une adéquation des textes avec les pratiques du terrain : les sapeurs-pompiers peuvent désormais réaliser des actes de soins d’urgence. Le décret n° 2022-621 du 22 avril 2022 définit ainsi les 12 actes de soins d’urgence relevant de la compétence des sapeurs-pompiers après formation.
S’agissant de la normalisation des tenues et des équipements, le développement des mutualisations entre SIS doit être poursuivi. Favorisé par l’essor des référentiels techniques portant label de sécurité civile française inhérents aux équipements de protection individuelle, son extension aux équipements et matériels roulant s’amplifiera en 2023. Forte des travaux qu’elle mène depuis plusieurs années dans le champ des matériels et équipements, la DGSCGC poursuivra ses efforts autour des approches innovantes. Ces actions constituent des avancées majeures pour les services d’incendie et de secours, tant pour la sécurité des personnels que pour la réduction des coûts d’équipement et la valorisation de l’industrie textile française.
En matière de formation, qui constitue l’un des principaux vecteurs de déploiement de la doctrine, le contenu de la formation aux gestes de soins d’urgence pouvant être réalisés par les sapeurs-pompiers vient d’être défini.
La mise en œuvre et la généralisation de ces nouvelles compétences dans l’ensemble des services d’incendie et de secours constituera un enjeu fort en 2023. Ces différentes formations délivrées aux sapeurs-pompiers, par les organismes de formation des services d’incendie et de secours, intégreront peu à peu le schéma directeur national de la formation, établi en 2022, afin de rationaliser l’offre, grâce notamment à la mise en place d’un conventionnement avec le CNFPT et d’une plus forte coordination zonale.
En outre, la DGSCGC assure la tutelle de l’école nationale supérieure des officiers sapeurs-pompiers (ENSOSP). En 2022, elle s’est attachée à finaliser et à faire adopter le nouveau contrat d’établissement de l’ENSOSP. La mise en œuvre de ce contrat donnera une nouvelle dynamique à l’établissement reposant sur des objectifs stratégiques redéfinis, des moyens financiers assurés en 2022 et 2023 et dans une logique d’efficience. Le contrat d’établissement définit également des critères d’évaluation de la performance dans les domaines pédagogique, organisationnel et financier. En 2023, la DGSCGC veillera à faire vivre les engagements pris dans le cadre de ce contrat d’établissement et poursuivra notamment l’accompagnement de l’ENSOSP dans la négociation de son financement pour la période 2024/2026.
De même, en déclinaison du décret n° 2022-557 du 14 avril 2022 modifiant diverses dispositions relatives aux sapeurs-pompiers, pris en application de la loi du 25 novembre 2021 précitée, la DGSCGC engagera une mise à jour conséquente du cadre réglementaire de la formation des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires. (arrêté du 22 août 2019) avec pour objectif de réviser les contenus de formation pour les adapter aux missions réellement exercées. À ce titre, une évaluation de la formation des colonels sera conduite par la DGSCGC, avec l’ENSOSP et le CNFPT, en lien avec l’ensemble des acteurs concernés, notamment les préfets, présidents de CASIS et les directeurs départementaux, afin d’ajuster au besoin le contenu de cette formation mais d’identifier également les capacités à y intégrer le tronc commun de la formation des hauts fonctionnaires prévu par l’INSP. Ces travaux seront conduits dans la perspective de la mise en place d’une filière d’excellence pour les sapeurs-pompiers s’inscrivant dans le réseau des écoles de service public (RESP).
La protection des sapeurs-pompiers contre les agressions reste une priorité dans les objectifs 2023 et, à ce titre, un guide de doctrine et des travaux juridiques permettant l’utilisation des caméras individuelles ou embarquées à bord des véhicules sera réalisé en 2023.
En ce qui concerne l’action européenne et internationale de la France dans le domaine de la protection civile, la DGSCGC poursuivra en 2023 une action internationale très soutenue, avec une programmation initiale qui devrait atteindre plus de 500 actions qui permettront de valoriser le modèle français de sécurité civile et les entreprises de la filière. Cette valorisation est réalisée :
Au travers des diverses interventions de la DGSCGC :
à l’étranger dans la gestion des crises multiformes pour faire face aux catastrophes de toutes natures dans un contexte de dérèglement climatique et de situations complexes ainsi qu’en participant à divers projets et exercices européens ou internationaux permettant de préparer la réponse à ces crises ;
par la mise à disposition de modules et d’experts dans le cadre du mécanisme de protection civile de l’Union, la France étant d’ailleurs le premier contributeur dans ce domaine.
Au niveau des échanges et de la coopération internationale : la coopération bilatérale restera également soutenue avec les pays membres de l’Union européenne ainsi qu’avec les pays du bassin méditerranéen, l’Afrique subsaharienne, la zone Indopacifique mais également la communauté andine. Par ailleurs de nouveaux partenariats ambitieux se poursuivront avec des pays tels que le Canada, Singapour ou les États-Unis.
Récapitulation des objectifs et des indicateurs de performance
Objectif 1 : Assurer l'efficacité et l'efficience des dispositifs de lutte contre les feux de forêt
Indicateur 1.1 : Efficacité du dispositif de protection des forêts pendant la campagne "saison feux"
Objectif 2 : Assurer la disponibilité des moyens aériens et leur conformité aux besoins opérationnels
Indicateur 2.1 : Efficience des opérations de secours aux personnes en hélicoptère en milieux difficiles
Indicateur 2.2 : Taux de disponibilité opérationnelle des avions de la sécurité civile
Objectif 3 : Faire évoluer la cartographie des centres de déminage pour éliminer les munitions historiques et faire face à la menace terroriste
Indicateur 3.1 : Taux d'évolution des stocks collectés de munitions anciennes (Explosive Ordonnance Disposal ou EOD)
Indicateur 3.2 : Interventions sur objets suspects dans les délais (Improvised Explosive Devices Disposal ou IEDD)
Objectif 4 : Harmoniser les moyens des services départementaux d'incendie et de secours
Indicateur 4.1 : Taux de déploiement du système NEXSIS 18-112 au sein des SIS