Florence PHILBERT |
Directrice générale des médias et des industries culturelles |
Responsable du programme n° 334 : Livre et industries culturelles |
Le programme 334 « Livre et industries culturelles » regroupe les moyens budgétaires spécifiquement alloués par l’État, d’une part, à sa politique en faveur du livre et de la lecture (action 1) et, d’autre part, à certains axes prioritaires de sa politique en faveur des industries culturelles, et plus spécialement du secteur de la musique enregistrée (action 2).
Dans ces différents domaines, l’intervention publique vise à favoriser tout à la fois la valorisation des œuvres patrimoniales, la diversité et le renouvellement de la création et l’accès des publics les plus larges à l’offre culturelle.
En 2023, l’action publique en faveur de l’économie du livre a été particulièrement mobilisée autour des axes suivants.
Le soutien aux auteurs a été renforcé notamment par deux actions emblématiques :
– sous l’égide du ministère de la Culture, dans la continuité de l’accord de décembre 2022, des discussions entre auteurs et éditeurs ont été organisées. Elles ont permis d’identifier de nouveaux points d’amélioration dans l’équilibre de leurs relations contractuelles, qui mériteraient d’être généralisés à l’avenir.
– le protocole de rémunération des dédicaces dans les festivals de bande dessinée (BD) a été étendu à de nouveaux festivals de BD, soutenus par les services déconcentrés.
De même, l’État a approfondi son soutien aux librairies à travers la poursuite de la mise en œuvre de la loi n° 2021-1901 du 30 décembre 2021 visant à conforter l’économie du livre et à renforcer l’équité et la confiance entre ses acteurs :
– l’arrêté du 4 avril 2023 relatif au montant minimal de tarification du service de livraison du livre : entré en vigueur en octobre 2023, prévoit que les frais de livraison soient au minimum de 3 € en cas de commande de livres neufs inférieure à 35 € ;
– le décret n° 2023-497 du 22 juin 2023 relatif aux modalités de communication au public du prix des offres de livres neufs et de livres d’occasion donne une définition du livre d’occasion et précise les conditions d’affichage des prix par les détaillants et les plateformes de vente en ligne.
Dans l’esprit de la loi « Lang », ces règles nouvelles restaurent une concurrence plus équilibrée dans le secteur du livre.
En complément de ces mesures, la poursuite de la généralisation du dispositif « Jeunes en librairie (JEL) » a été assurée par les services déconcentrés dans la plupart des régions durant l’année scolaire 2022-2023, dont la Guyane pour la première fois. A partir de l’année scolaire 2023-2024, le financement par l’État relève des crédits du programme 334 et l’articulation avec le pass Culture a été précisée pour mieux utiliser sa part collective.
L’accessibilité des livres numériques a connu en 2023 une nouvelle étape à travers la transposition de la directive (UE) 2019/882 du 17 avril 2019 relative aux exigences en matière d’accessibilité applicables aux produits et services. Les acteurs du livre en France connaissent désormais avec précision leurs obligations pour proposer aux personnes en situation de handicap, à compter de juin 2025, une offre de livres numériques tenant compte de leurs besoins. Ce cadre juridique s’inscrit dans les travaux menés par le comité interministériel pour le développement d’une offre de livres numériques nativement accessibles, dénommé « COPIL LINA25 » (www.lina25.fr), qui se réunit chaque année pour conduire un plan stratégique avec l’ensemble des parties prenantes.
Pour les bibliothèques, l’année 2023 a vu la poursuite de la reprise d’activité amorcée en 2021. Alors que la fréquentation était revenue, à la fin 2022, à 80-85 % de celle enregistrée en 2019, on peut considérer qu’aujourd’hui, la perte de fréquentation causée par la crise sanitaire, est effacée. Cette appréciation globale masque des situations diverses selon les établissements, voire au sein d’un même réseau ou établissement, selon les implantations. Le ministère de la Culture a contribué à redonner plus de visibilité aux bibliothèques, en organisant une campagne nationale de communication en septembre 2023 : « Ma bibliothèque : le monde à portée de main ».
Malheureusement, les effets du surenchérissement des coûts énergétiques et de l’inflation sur les budgets des collectivités territoriales ont ralenti la dynamique du Plan Bibliothèques. En effet, si on enregistre en 2023 (comme les années précédentes) une consommation exhaustive des crédits du concours particulier Bibliothèques au sein de la dotation générale de décentralisation (DGD), la progression se fait plus lente pour les extensions des horaires d’ouverture. Certes, l’objectif de 500 extensions aidées à la fin de la première mandature a été dépassé, mais le nombre de nouveaux projets décroît chaque année : de 81 opérations lancées en 2021, nous sommes passés à une soixantaine, en 2022, et, probablement, seulement à une quarantaine en 2023. Il est donc indispensable de donner un nouveau souffle à la politique d’élargissement de l’ouverture des bibliothèques. Cette relance est l’un des objectifs majeurs de la stratégie « Lecture et territoires » engagée en 2024.
La stratégie « Lecture et territoires » poursuivra ces deux objectifs : consacrer un effort particulier aux territoires prioritaires (ruralité, Outre-mer, QPV), au travers de la politique contractuelle, et intensifier les actions en direction des jeunes. La priorité donnée à la ruralité s’appuiera sur les contrats départementaux lecture (CDL), afin d’amplifier l’action des bibliothèques départementales au service des bibliothèques des communes rurales et des petites villes. A la fin 2023, 64 départements sont déjà partenaires de ce contrat de 3 ans, renouvelable deux fois. L’État souhaite contractualiser avec l’ensemble des départements d’ici 2027 et rehausser le niveau de son aide aux départements partenaires. Par ailleurs, les moyens alloués aux 240 contrats territoires lecture (CTL) sont maintenus.
Les travaux du troisième volet du Plan Bibliothèques, dédié à la formation des professionnels et des bénévoles, se poursuivent, en associant l’ensemble des acteurs (associations d’élus, associations professionnelles, acteurs de la formation) : l’année 2023 a vu la mise en place dans presque toutes les régions d’une offre de formation régionalisée, construite par l’ensemble des partenaires locaux.
Après la réouverture en septembre 2022 du quadrilatère Richelieu de la Bibliothèque nationale de France (BnF), l’année 2023 a marqué sa première année complète de fonctionnement. Le site entièrement rénové a rencontré son public, au-delà des estimations, comme l’illustrent les chiffres de sa fréquentation : 614 601 visiteurs en 2023 (contre 253 261 en 2022 et 151 000 en 2021). Le projet de futur centre de conservation à Amiens, qui accueillera, à l’ouverture en 2029, son conservatoire national de la presse, a vu en 2023 la tenue du concours d’architecture, dont le résultat sera dévoilé en mars 2024. Le projet de rénovation des espaces publics de la Bibliothèque publique d’information (Bpi) a été revu en 2021-2022 pour le synchroniser avec les travaux de restructuration du Centre Pompidou, prévus à partir de 2025. L’année 2023 a été consacrée au lancement de la préparation du déménagement de la Bpi vers le site qui l’accueillera dans le 12e arrondissement de Paris, durant la fermeture du Centre Pompidou pour travaux (2025-2030).
En matière de développement de la lecture, on citera en 2023 la poursuite de deux actions particulières : le développement d’actions originales du Centre national du livre (CNL), par exemple autour de la lecture à haute voix et d’une meilleure insertion des auteurs dans l’éducation artistique et culturelle, et le début de mise en œuvre du plan visant à faciliter l’accès à la lecture des personnes handicapées. Ce plan se décline en deux mesures : la création d’un portail national de l’édition accessible et adaptée, confiée à la BnF et qui ouvrira en 2026, et le développement d’un plan de production de documents adaptés, piloté par l’Institut national des jeunes aveugles (INJA).
Enfin, l’année 2023 a vu des avancées majeures pour la future Maison du dessin de presse, projet piloté par le ministère de la Culture : validation, au début de l’année, du programme scientifique et culturel, préparé par l’équipe de préfiguration ; élaboration par l’OPPIC au printemps du programme architectural, puis organisation à l’automne de la procédure négociée visant à choisir l’architecte du projet. Le dépôt du projet de permis de construire et la finalisation de l’accord entre l’État et la Ville de Paris sur le futur bail marqueront, au printemps 2024, des étapes déterminantes pour le projet, dont l’avancement respecte le calendrier prévisionnel prévoyant une ouverture en 2026.
Dans le champ plus spécifique du soutien au secteur de la musique enregistrée, le ministère de la Culture assure la tutelle du Centre national de la musique (CNM), créé le 1er janvier 2020, et qui réunit en son sein cinq structures actives dans le champ de la filière musicale dans son ensemble (spectacle vivant, production phonographique, édition musicale, etc). Conformément à la loi du 30 octobre 2019 portant sa création, l’établissement a désormais compétence en matière de soutien à la création, la distribution, l’exportation ou encore l’innovation pour l’ensemble du secteur musical et des variétés. Il délivre également, pour le compte du ministre chargé de la Culture, les agréments du crédit d’impôt au titre des dépenses de production et de développement d’œuvres phonographiques, des dépenses de production de spectacle vivant, et des dépenses d’édition d’œuvres musicales, tous trois prorogés en loi de finances pour 2024 jusqu’au 31 décembre 2027.
La fin des crédits exceptionnels obtenus en réponse à la crise sanitaire, les profondes transformations induites par la crise sanitaire sur le secteur musical et les risques pesant sur le schéma initial de financement du CNM (incertitudes relatives à la taxe sur les billetteries dans le contexte des Jeux Olympiques de 2024, contribution limitée des OGC suite aux conséquences de l’arrêt RAAP) ont nourri de fortes préoccupations au sein de la filière. Pour y répondre, la première ministre a confié en octobre 2022 au sénateur Julien Bargeton une mission relative au financement de la filière et à l’articulation entre les différents dispositifs de soutien existants. Sur le fondement des conclusions de cette mission, la Parlement a introduit en loi de finances 2024 la mise en place d’une contribution obligatoire assise sur le chiffre d’affaires des plateformes de streaming musical, gratuites et payantes. Cette nouvelle ressource permet un rééquilibrage du financement du CNM et le renforcement pérenne de ses interventions en direction de la filière. Celles-ci feront l’objet d’une refonte générale courant 2024 pour mettre au service des professionnels du secteur musical des programmes de soutien adaptés et performants.
Récapitulation des objectifs et des indicateurs de performance
Objectif 1 : Favoriser l'accès du public aux bibliothèques et le développement de la lecture
Indicateur 1.1 : Fréquentation des bibliothèques
Indicateur 1.2 : Amélioration de l'accès au document écrit
Objectif 2 : Soutenir la création et la diffusion du livre
Indicateur 2.1 : Renouvellement de la création éditoriale
Indicateur 2.2 : Part de marché des librairies indépendantes