Alexis ZAJDENWEBER |
Commissaire aux participations de l'État |
Responsable du programme n° 731 : Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État |
Depuis 2020, l’État actionnaire, à travers l’APE, démontre autant que de besoin sa capacité d’adaptation lors de ses interventions auprès des 85 entreprises de son portefeuille ces dernières évoluant dans un nouveau contexte sanitaire, macroéconomique et géopolitique global qui a conduit l’État à infléchir sa doctrine d’intervention définie en 2017 (alors axée sur la respiration du portefeuille pour mieux investir notamment dans les entreprises stratégiques et participant à une mission de service public) suite à l’interruption des mouvements de cessions.
C’est ainsi que depuis près de trois ans, quatre priorités majeures déterminent la présence de l’APE dans un environnement en constante évolution :
- La nécessité de continuer à soutenir des entreprises frappées par les différentes crises successives (sanitaire, énergie, inflation) ;
- La prise en compte de la souveraineté économique et des besoins liés à la réindustrialisation du pays ;
- Les exigences environnementales qui accélèrent considérablement la transformation des modèles économiques ;
- La disruption numérique et technologique qui bouleverse profondément les marchés et les modèles d’activité des entreprises.
L’APE a articulé ses interventions en 2023 autour de quatre grands axes :
1) Soutenir les participations en période de crise, renforcer leur résilience et préparer la reprise en soutenant leur politique d’investissement
1.1- Lors de la crise sanitaire de 2020, l’État avait pleinement joué son rôle d’actionnaire de long terme, en assurant aux entreprises les capitaux dont elles avaient besoin pour améliorer leur situation bilancielle. L’État a également pu sécuriser leur capital face aux prises de contrôle inamicales dont elles auraient pu faire l’objet dans un contexte d’effondrement des valeurs boursières.
Au-delà des entreprises stratégiques, l’État a également apporté parallèlement son soutien financier, dans le cadre du Fonds de transition, à des entreprises de taille significative particulièrement touchées par la crise mais n’ayant pu bénéficier des aides d’urgence de manière adéquate.
En 2023, l’État a poursuivi ses mesures d’accompagnement des entreprises post-crise sanitaire en leur donnant les moyens de reprendre leur politique d’investissement.
L’État a ainsi dans un premier temps poursuivi son intervention à travers un second levier d’intervention initié pendant la crise sanitaire, à savoir le recours aux fonds sectoriels assurant le soutien en fonds propres de certaines filières stratégiques fragilisées durant la crise sanitaire et permettant ainsi de sécuriser leurs capitaux. Au 31 décembre 2023, 158,11 M€ ont été versés via le CAS PFE au Fonds d’Avenir Automobile n° 2, au Fonds France Nucléaire et au Fonds Ace Aéro Partenaires.
De manière plus ponctuelle et ciblée, l’État a également accompagné le groupe Air France-KLM au cours du 1er semestre 2023 dans les opérations de remboursement des aides en recapitalisation accordée en 2021 par l’État et ce afin d’en lever les contraintes opérationnelles associées. Dans le même temps, l’État a procédé à la souscription à de nouveaux TSS à durée indéterminée d’un montant total de 728 M€, l’ensemble de ces opérations permettant ainsi au groupe de retrouver ses marges de manœuvre dans un contexte de reprise rapide de l’activité du secteur aérien.
1.2- Au-delà de la crise sanitaire, l’État a également été confronté au conflit russo-ukrainien qui, en amplifiant certains risques économiques et notamment les tensions énergétiques, a conduit l’État actionnaire à renforcer l’indépendance énergétique de la France à travers notamment la reprise du contrôle de l’intégralité du capital d’EDF pour 9,66 Md€.
Initiée en novembre 2022 et prolongée sur l’année 2023, l’OPAS aujourd’hui achevée permet désormais :
a) de reprendre le plein contrôle des activités les plus régaliennes de production d’électricité décarbonée (notamment l’électricité d’origine nucléaire qui représente environ 70 % du mix énergétique national actuel) ;
b) d’engager l’entreprise sur des projets de long terme, sans être indûment exposée à la volatilité de très court terme des marchés financiers ;
c) de renforcer auprès des investisseurs la crédibilité du soutien de l’État auprès du Groupe et d’envoyer un signal fort aux investisseurs quant à la détermination de l’État de préserver la notation « investment grade » solide du Groupe, dont le maintien avait été l’objectif de l’augmentation de capital réalisée en avril 2022 ;
d) de faciliter la prise de décision et le pilotage stratégique de l’entreprise.
2) Porter attention à certains secteurs pouvant être considérés comme stratégiques et faire l’objet d’une attention minutieuse à des fins de prospection
Par ailleurs, à travers les opérations patrimoniales ciblées relevant de son périmètre d’intervention propre, l’APE veille à préserver l’indépendance nationale, la souveraineté, la présence de long terme dans des entreprises essentielles au fonctionnement de l’économie française.
L’État actionnaire veille également à soutenir le développement d’entreprises à l’international tel qu’il l’a fait notamment à travers une augmentation de capital de 50 M€ auprès de l’Imprimerie nationale lui permettant ainsi de maintenir sa position dans le secteur de l’identité physique et d’être en mesure de développer son activité dans l’écosystème digital.
3) Défendre par des interventions en capital ciblées les intérêts stratégiques de la nation
L’État actionnaire dispose d’outils spécifiques qui lui permettent de contribuer à la sécurisation du capital d’entreprises d’importance stratégique ou à la mise en place de dispositifs de suivi appropriés. Au-delà de la prise de participation au capital pour une part significative, l’État peut ainsi dans certains cas se doter d’actions spécifiques ou d’actions de préférence comme il a été amené à le faire courant 2023 dans le secteur de la défense et de l’aéronautique à travers l’acquisition d’une action de la société Exxelia International SAS auprès de la société Écho 1 SAS.
4) Enfin, développer une politique actionnariale autour de grands axes transversaux de long terme tels la responsabilité sociale et environnementale, la transition énergétique, les achats responsables
En 2023, l’État actionnaire a poursuivi sa feuille de route pour intensifier l’engagement des entreprises dont il est actionnaire dans la réduction de leur empreinte climatique. A travers son dialogue avec les dirigeants et lors des instances de gouvernance, l’Agence des participations de l’État incite les entreprises dans lesquelles elle détient une participation à s’engager pleinement dans la lutte contre le changement climatique. A ce titre, l’APE, de concert avec les entreprises du portefeuille, suivra désormais les projets stratégiques de transformation de leurs fonctions achats afin de s’assurer que celle-ci satisfait bien aux objectifs de résilience (diversité, notamment, des chaînes d’approvisionnement) et de responsabilité (achat durable, local et social).
L’APE incite également à la prise en compte de critères RSE, notamment liés à l’impact carbone, dans les critères de rémunération variable des dirigeants. A la suite de l’envoi à toutes les entreprises du périmètre de l’APE d’une charte RSE en avril 2021, les premiers résultats s’avèrent très encourageants. Ainsi, 100 % des entreprises du portefeuille coté et 57 % du portefeuille non coté se sont dotées d’un objectif de réduction des gaz à effet de serre (GES). Pour 64 % des entreprises du portefeuille coté, cet objectif de réduction des GES est aligné avec l’Accord de Paris, et 27 % d’entre elles sont engagées dans la démarche de certification afin d’attester de cet alignement1.
En fin d’année 2022, l’APE a pris toute sa part aux travaux relatifs au projet de loi « Industrie verte » et continue de s’engager en faveur de la transition écologique des entreprises de son périmètre.
De la même façon, l’État actionnaire est attentif aux mécanismes mis en œuvre par les entités du portefeuille tels que la participation aux résultats, l’intéressement, l’actionnariat salarié, ainsi garants de la préservation de l’intérêt social et du partage de la valeur.
Quel que soit ce contexte, l’État actionnaire garde à l’esprit ses objectifs intrinsèques d’investisseur de long terme : préserver la valeur de ses participations, assurer le succès de ses opérations et renforcer la résilience des entités ainsi suivies. L’Agence des Participations de l’État assure en effet, quel que soit le contexte et au-delà d’opérations ponctuelles, un suivi permanent des résultats et des perspectives des entreprises, de leur stratégie, et notamment de leurs opérations de croissance externe sous des aspects économiques, industriels et sociaux.
Ainsi, après une hausse de +10,6 % (hors EDF) en 2022 le portefeuille coté de l’APE, représentant une valeur totale de 50,2 Md€ d’euros au 31 décembre 2023 a enregistré de nouveau en 2023 une hausse de +15,7 %, à comparer avec le CAC 40 en hausse de +16,5 % sur la même période.
Les activités correspondantes sont décrites dans le rapport annuel de l’État actionnaire, rédigé chaque année par l’APE, en application de l’article 142 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques (NRE), et annexé chaque année au projet de loi de finances. Le maintien des indicateurs adossés au programme permettra de suivre leur évolution dans la durée et mesurer les conséquences de la crise sur la valeur du portefeuille de l’État et sa composition.
Enfin, ce programme n’appréhende pas les moyens humains et de fonctionnement dont dispose l’APE, qui sont retracés dans le programme « Stratégie économique et fiscale » (P.305) de la mission « Économie ». La présentation de ces moyens figure également dans le rapport annuel de l’État actionnaire.
1 100 % du portefeuille coté réalise un bilan carbone complet, incluant les émissions indirectes, et 41 % du portefeuille non coté ; 100 % des entreprises du portefeuille coté se sont dotées d’un objectif de réduction des GES et 57 % du portefeuille non coté. Sur le portefeuille coté, pour 64 % d’entre elles cet objectif est aligné avec l’Accord de Paris, et 27 % sont engagées dans la démarche de certification pour attester de cet alignement ; la politique climatique des entreprises est présentée aux organes de gouvernance de manière annuelle pour 100 % des entreprises cotées et près de la moitié des non cotées ; les critères de rémunération des cadres dirigeants intègrent l’impact carbone pour 100 % du portefeuille coté et 76 % du non coté.
Récapitulation des objectifs et des indicateurs de performance
Objectif 1 : Veiller à l'augmentation de la valeur des participations financières de l'État
Indicateur 1.1 : Rentabilité opérationnelle des capitaux employés (ROCE)
Indicateur 1.2 : Suivi et maîtrise de l'endettement
Indicateur 1.3 : Taux de rendement de l'actionnaire
Objectif 2 : Assurer le succès des opérations de cessions des participations financières
Indicateur 2.1 : Écart entre les recettes de cessions et la valeur boursière des participations cédées
Indicateur 2.2 : Taux des commissions versées par l'État à ses conseils